Le récit de Louisa du voyage à vélo au féminisme

Le récit de Louisa du voyage à vélo au féminisme

Durant ce mois de la mobilité consacré au vélo, on partage beaucoup de choses diverses et variées, notamment sur notre Instagram que l’on vous conseille de suivre.
A l’heure des réseaux où la majorité du contenu que l’on consomme est très souvent du contenu court, aujourd’hui on vous propose de prendre le temps. Prendre le temps pour lire le récit de Louisa, son histoire avec le vélo, de ses débuts tardifs à son niveau actuel, entre mauvaises expériences et féminisme. Ce récit s’adresse à tout le monde, des personnes qui ont peur de “passer le pas” aux gens les plus expérimentés. Il est néanmoins dédié à toutes les femmes confrontées à des murs qu’elles n’ont pas encore franchis. En espérant que cet article en aidera certaines à faire tomber quelques briques.

 

Ô Canada !

Comme tout le monde, j’ai fait du vélo enfant, mais c’est bien plus tard que ma réelle histoire d’amour avec ce dernier a commencé. Ayant grandi dans la vallée de Chamonix, je n’ai jamais trop été attirée par le vélo. Ici, les sports principaux c’étaient plutôt le ski ou le trail, notamment à cause du territoire qui n’était vraiment pas simple pour quelqu’un qui débute.
Pour vous dire, entre 15 et 20 ans, j’ai dû faire 2 fois du vélo de route avec un copain, et j’ai trouvé ça horrible ! J’avais un vélo pas du tout adapté et je m’étais juste dit que ce n’était pas pour moi.

Mon histoire avec le vélo a commencé loin, très loin de Chamonix : au Canada ! A 21 ans je suis partie vivre au Québec. Alors que j’avais du mal à me créer un nouveau cercle social, je me suis réfugiée très vite dans le sport. Il s’avère qu’à ce moment-là le VTT était en plein essor là-bas, il y avait beaucoup de stations de basses altitudes où le terrain s’y prêtait parfaitement, donc je me suis acheté un vélo et j’ai commencé à apprendre les bases, avant de me faire des potes de fil en aiguille grâce à ça. Ce début d’idylle avec le vélo à travers les forêts canadiennes, ça a duré un peu plus de 3 belles années au final, avant de rentrer au bercail.

Quand je suis rentrée en France, j’ai voulu continuer le VTT, avant de rapidement décider d’essayer autre chose : le vélo de route. 1 an après mon retour, me voilà prête à me lancer dans ma 1ère expérience de bikepacking. J’ai toujours eu besoin de passer beaucoup de temps seule, donc c’était l’évidence pour moi d’essayer.
Au Québec, j’avais fait quelques week-ends en mode VTT/camping, mais rien de plus.
Cette fois j’étais décidée, motivée, je vais partir longtemps en autonomie, mon vélo, mon matos et moi, rien ni personne de plus. Spoiler ? Ça a été une des pires expériences de ma vie.

 

Le bingo de la galère

Je vous la fais courte, mais je décide de partir 2 semaines et demie (ambitieuse la meuf !). Malheureusement, j’ai choisi la pire destination possible pour un trip vélo je pense : direction Madère (pour les nuls en géo qui ne veulent pas décoller de mon histoire passionnante le temps de faire une recherche Google, c’est un archipel vers le Portugal).
Pourquoi là-bas ? Bonne question ! Au départ je devais aller aux Lofoten en Norvège, avant de me dire “en fait flemme d’aller jusqu’à là-bas” et de tomber sur Madère je ne sais plus comment. Je checke une carte, je vois une route qui semble faire le tour d’une île qui n’est pas très grande, donc je me dis que 2 semaines et demie ce sera largement suffisant !
En plus je vois très peu de ressources concernant le bikepacking à Madère sur internet, donc je me dis que c’est génial, au moins il ne devrait pas y avoir trop de monde (ne faites jamais comme moi). Niveau équipement ? Je n’avais pas de vrai vélo de route, avec des grosses sacoches dans lesquelles j’allais pouvoir mettre plein de trucs, même des bouquins ! (ne faites jamais comme moi, bis). Donc tout ça étant prêt, direction un endroit que je ne connais pas, sur lequel je n’avais trouvé aucune ressource bikepacking, avec aucune expérience pour ce genre de trip, équipée n’importe comment, chargée à bloc niveau confiance en moi… Mais qu’est-ce qui pouvait bien mal se passer ?!

En fait, à peu près tout. Sans rentrer dans le détail de ce voyage que j’ai surnommé Madère La Galère, car cela prendrait des pages et des pages d’article, ou un podcast de 2 heures pour tout raconter, mais ça a été l’une des pires expériences de ma vie. Pas pire expérience vélo hein, vous avez bien lu.
Déjà, l’île n’était pas du tout adaptée au voyage à vélo : il y a des jours où je passais plus de temps à pousser mon vélo qu’à pédaler tellement les pentes étaient trop raides, surtout pour mon vélo qui était bien trop lourd pour moi. Se rajoute à ça l’énorme difficulté pour trouver des endroits où dormir puisque le camping sauvage est quasiment interdit partout (comment ça c’est le genre de choses qu’on vérifie avant le départ ?). Surtout, j’ai vécu un enchaînement de péripéties improbables… Ce genre de situation où je me suis retrouvé à gérer seule une blessure avec un problème de matos à 21H30 à l’autre bout de l’île, à 2H de la moindre population qui aurait pu m’aider, sans réseau téléphone et la nuit qui commençait à tomber. Ambiance ! Résultat, je suis rentrée au bout de 4 jours. Désillusion totale.

C’est impossible en quelques lignes de transmettre l’expérience que fût Madère pour moi. Pourtant, je peux le dire avec le recul, ces 4 jours m’ont totalement changé. Ça a mis du temps avant que je puisse le digérer et en faire quelque chose de positif, pendant longtemps, ça a juste été une écorchure à vif. Après cette expérience, je ne suis pas repartie en voyage à vélo seule pendant 2 ans. Parce qu’au-delà de cette dernière, ce qui a suivi après fût aussi compliqué.

Retour à la maison ! 

Me voilà donc de retour en France, revenant de l’enfer, avec en prime une vie perso chaotique et 2 semaines de vacances encore devant moi ! C’est cool le vélo, on repart quand ?! En fait, bientôt. Je ne pouvais pas rester chez moi à me morfondre sur mon échec et j’avais le sentiment que ce n’était pas la pratique du vélo le problème, mais l’ensemble de choses entourant mon voyage.
Je me décide à me racheter le 1er vélo de route semblant potable que je trouve d’occasion (parce que la compagnie a perdu mon vélo, qui est revenu endommagé 3 semaines plus tard, décidément…) et j’envoie un message à une amie qui était équipée, expérimentée et dispo pour partir quelques jours avec elle dans le Sud avant que d’autres amis puissent se joindre à nous. Un concours de circonstances qui m’a permis de ne pas divorcer du vélo, de mettre un pansement sur une plaie qui allait mettre du temps à cicatriser.

A force d’entendre toutes ces remarques, de faire face à ces questionnements, ces jugements, j’ai fini par douter de leur véracité, à admettre que peut-être, oui, en tant que femme, des voyages solo à vélo ce n’était pas pour moi.

Être une femme seule à vélo

Après ce petit périple bien accompagnée qui a sauvé la suite de mes vacances, s’est suivie une longue période de doutes, de remise en question, de honte… Surtout, une période durant laquelle je me suis retrouvée confrontée aux innombrables remarques du monde concernant mon échec, me renvoyant à ce que j’étais avant tout : une femme seule à vélo.
C’est après Madère que débute profondément mes réflexions autour du féminisme, grâce ou à cause du fait que j’ai très vite été ramenée à ça quand il était question d’aborder mon voyage à Madère : “En même temps tu pars toute seule en tant que femme, à quoi tu t’attendais ?” “Pourquoi t’es parti comme ça toute seule en vélo ?” “En tant que femme seule, c’était sûr que t’allais avoir des problèmes”

Ce genre de phrases venant d’un peu tout le monde : familles, amis, et même des gens que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam qui se permettaient ce genre de remarques dès qu’il savait que j’avais osé partir seule. Que ce soit de la méchanceté, de l’arrogance, du mépris ou de l’inquiétude, il y avait toujours une constante : faire le lien entre le fait que ça se soit mal passé et le fait que je suis une femme.
Tout ça m’a transpercé. Quand j’étais au Québec, je n’avais jamais été confronté à des remarques sexistes, jamais on ne m’a sous entendu que parce que j’étais une femme je ne pouvais pas avoir les mêmes pratiques que les hommes. Donc en revenant en France, je ne voyais pas pourquoi ce serait différent. Il s’avère que c’est le cas et que ça a mis longtemps avant que je l’accepte et que j’en tire du positif.

On me demande souvent quel a été le déclic pour “passer le cap” de voyager seule à vélo pour la première fois. Mais le cap était naturel pour moi au début ! Je suis partie avec beaucoup d’enthousiasme mais aussi beaucoup d’insouciance à Madère, je ressentais limite une forme de fierté au fait de partir à l’arrache. C’est ce qui m’a valu une double claque. Une claque là-bas et une claque en revenant. Une claque en échouant, et une claque en entendant en boucle que mon échec était une évidence du fait que je sois une femme. C’est après ça que j’ai mis du temps à passer ce fameux cap, à me dire que j’en étais capable. A force d’entendre toutes ces remarques, de faire face à ces questionnements, ces jugements, j’ai fini par douter de leur véracité, à admettre que peut-être, oui, en tant que femme, des voyages solo à vélo ce n’était pas pour moi.

L’expérience de Madère et ce que j’ai vécu avec le retour en France a été tellement puissant que ça a pris du temps avant que je puisse voir la chose avec du recul, avant d’en faire une force.

Here we go !

Alors comment j’ai fait pour repartir ? D’abord, j’ai pris le temps. Comme dit plus haut, mon premier vrai voyage à vélo seule après Madère est arrivé 2 ans après. Entre temps, j’ai pris le temps de digérer, et de continuer à faire ce que j’aimais : pédaler. J’ai énormément amélioré mon niveau de pratique en partant une journée par ci, un week-end par là.

A côté de ça, je suis partie seule en voyage, mais pas à vélo, en van, pendant 6 mois. Un moyen pour moi de distinguer la pratique du vélo au fait de voyager seule, et de pouvoir (m’)affirmer que l’aventure Madère n’était ni liée à la pratique du vélo, ni au fait de voyager seule, et que chaque pan se tenait très bien indifféremment. Brique par brique donc, accepter de prendre le temps. En parallèle, j’ai aussi évoluée au niveau de mes convictions et mes connaissances sur le féminisme, ce qui m’a permis ensuite d’être plus sereine et plus encline à être pédagogue face aux gens qui m’interpellent sur mes choix.

Si au début ça m’agaçait (voir même me mettait en colère), aujourd’hui, quand on me demande si je n’ai pas peur, si je ne crains pas « d’avoir des problèmes » ça me donne envie de passer des heures à expliquer mon cheminement, avec compassion. A tout reprendre depuis le début pour qu’on comprenne bien ce que la peur est, par essence, et pourquoi elle est aujourd’hui en partie ce qui rend notre société malade (ou du moins ce qui l’empêche de guérir). Ça me donne envie de raconter qu’autrefois j’en emportais toujours une poignée avec moi, dans le fond d’une de mes sacoches, parce que c’était normal, tout à fait rationnel, voire rassurant, d’avoir peur. Puis comment, un jour, je suis parvenue à les déposer sur le bord d’une route de campagne et je suis partie sans me retourner. Ca me donne envie à chaque fois de dire à toutes celles et ceux qui pensent que je fuis quelque chose, ô combien ils se trompent. Car quand je pars seule à vélo, je ne suis pas en cavale, je suis en voyage. Je ne m’échappe de rien, j’agrandi l’espace dans lequel je me sens en sécurité. Je ne m’en vais pas, je vais vers le monde.

Toute la bouteille que j’ai acquise maintenant en voyage solitaire – grâce notamment à Madère – est venue dégager une partie du brouillard présent dans ma tête concernant ma légitimité, mes capacités, la peur des imprévus… Mais pour me retrouver aujourd’hui dans LA zone, celle où j’ai assez de connaissances matérielles, assez de connaissances de la pratique et assez de confiance en moi, il a fallu que j’explore les extrêmes et que je fasse plein d’erreurs. Et c’est ok, peu importe ce que l’on peut vous dire, peu importe votre identité de genre.

 

Si au début les remarques m’agaçaient, aujourd’hui ça me donne envie de passer des heures à expliquer mon cheminement, avec compassion. […] Quand je pars seule à vélo, je ne suis pas en cavale, je suis en voyage. Je ne m’échappe de rien, j’agrandi l’espace dans lequel je me sens en sécurité. Je ne m’en vais pas, je vais vers le monde.

Quelques conseils à retenir dans tout ça ?

Vous vous doutez bien, si je raconte un bout de mon histoire avec le vélo, ce n’est pas par égotrip. Aujourd’hui j’ai vraiment à cœur de partager des retours d’expérience à qui a envie de l’entendre, pour espérer faire sauter des verrous que des personnes, notamment des femmes, peuvent se mettre. C’est pour ça que quand vient le moment d’apporter des conseils, je suis divisée. Si je devais m’adresser à l’ancienne Louisa qui s’apprête à partir pour Madère, je pourrais être tentée de lui expliquer la vie, de lui dire fais ci, fais pas ça, prend le temps… Mais avec le recul, ce qui prédominerait, c’est de l’encourager et de m’en tenir à des conseils techniques. Oui Madère fût une expérience difficile, qui a laissé beaucoup de marques, comme d’autres expériences bonnes ou mauvaises en ont laissé. Mais ces marques font ce que je suis actuellement. Je n’ai jamais eu autant confiance en mes capacités de “bikepackeuse” qu’aujourd’hui, car j’ai pris le risque de me faire mal à un moment, comme j’ai su m’écouter et prendre le temps à d’autres.

Alors mon conseil numéro 1, ce serait le suivant : écoutez-vous !
Prenez des conseils techniques, des recommandations à droite à gauche évidemment (par exemple, ne prenez pas d’ énormes bouquins dans vos sacoches) mais dans le but de réaliser ce que vous avez envie de faire. Des conseils qui vous éviteront de vous retrouver à pousser votre vélo pendant 4h parce qu’il est trop lourd, mais laissez de côté les faux conseils qui remettent en cause votre envie de départ (surtout s’ils vous sont donnés par un homme bland CSP+ passé la trentaine, je dis ça, je dis rien…).
Dans ce sens, je vous partage une longue liste de contenus à la fin de l’article.

Nous les nanas, on part avec un handicap de départ car on n’est pas poussées, pas supportées de la même manière que les hommes. Alors c’est vraiment de la sororité pour moi de dire ça : il est important que nos expériences se fassent, qu’on en ressorte avec des clés de compréhensions et que ça fasse de nous des femmes plus indépendantes. Je pense que c’est ce que je dirais à ma fille si j’en avais une, tout en espérant qu’à l’avenir le climat ambiant changera. Car oui, si je me mets dans la peau d’une maman qui lirait mon texte par exemple, forcément je comprendrais qu’elle me dise qu’elle n’a pas la même inquiétude si son fils part seul que si c’est sa fille qui part. Mais il est justement là le problème, ça ne devrait pas être normal. J’ai envie qu’on arrête de considérer qu’une femme seule à vélo c’est moins safe qu’un homme, car même si c’est encore vrai, c’est de toute façon moins safe d’être une femme dans la rue, d’être une femme tout court.

L’une des raisons pour lesquelles j’ai commencé à voyager seule, c’était parce que je voulais me prouver des choses à moi-même. Aujourd’hui si je continue, c’est aussi pour prouver des choses au reste du monde.

Petite (oups, grande) liste de ressources vélo-femmes-aventure etc.

Ressources bikepacking :

Films inspirants de femmes à vélo :


Comptes insta inspirants de femmes ou de groupes de femmes qui font du vélo :

  • @sistersinthewildeu
  • @le.grew
  • @girlsgonegravel
  • @breakfast_cc
  • @gow_girlsonwheels
  • @thewcollectivee
  • @samisauri
  • @desertusbikus
  • @fastwontlast.cc


Podcasts :

  • Épisode : Les baladeurs, solo et à vélo de Bretagne en Iran, avec Isabel Del Real
  • Épisode : Ultra Talk, épisode #219 avec Caroline Prigent
  • Épisode : Ibex Talk, épisode #10 avec Camille Albisser
  • Chaîne : Le Grew
  • Chaîne (anglais) : Girls Gone Gravel
  • Chaîne (anglais) : Femme Cyclist Podcast
Une saison sans avion  le témoignage de Coline Ballet-Baz

Une saison sans avion le témoignage de Coline Ballet-Baz

Le récit de Coline

Cela faisait quelques années que l’envie de ne plus prendre l’avion me trottait dans la tête, par conviction écologique. Et j’ai décidé au début de cette saison d’hiver 23/24 de mettre cette envie en pratique, pour voir par moi-même si tous les freins pré-supposés à cette démarche étaient fondés, ou pas : peur de mécontenter certains sponsors, de manquer certaines opportunités pour filmer ou de ne plus être invitée sur certains évènements importants… Grosso modo peur de ne plus pouvoir continuer ce métier en arrêtant de prendre l’avion.

Au final cette annonce a été très bien reçue par les marques et personnes avec lesquelles je travaille, la saison a été remplie de tournages pour divers projets dans nos merveilleuses Alpes (qui plus est bien enneigées cette saison !), le budget et la fatigue dus aux longs trajets en avion et décalages horaires qui s’en suivent ont été remplacés par plus de temps en montagne et sur les skis 🙂

Loin de moi l’envie de porter un jugement sur les personnes qui voyagent en avion avec ce texte, nous n’avons pas tous.tes les mêmes réalités, je l’ai moi-même beaucoup pris à l’époque des compétitions internationales, et surtout le système écocidaire qui ne prévoit pas de taxe sur kérosène des avions, fait qu’il est malheureusement souvent beaucoup plus abordable de prendre l’avion plutôt que le train. POW a fait un post sur le comparatif train/avion, à partir d’un rapport de Greenpeace.

Mais cette démarche fait sens pour moi à plusieurs niveaux : diminuer mon bilan carbone de femme française bien au-delà des limites qui pourraient être fixées pour rester dans les Accords de Paris 1 ; ralentir le rythme parfois trop effréné de nos vies occidentales ; apaiser un peu les contradictions environnementales liées à ma pratique professionnelle du ski (il en reste encore !) ; apprendre à plus connaître les montagnes autour de chez nous, leur nivologie, leur évolution au fil d’une saison d’hiver ; diminuer la logistique et les coûts énormes liés aux déplacements en avion ; rêvasser en musique derrière la vitre d’un train plutôt que d’attendre dans les files interminables des contrôles de bagages… 

Envisager les futures saisons de cette manière me rend très heureuse et apaisée, continuer à prévoir des tournages pour le ski et des aventures en montagne dans un périmètre accessible en train ou en voiture, en réduisant peut-être la fréquence de ces voyages et en prenant plus de temps pour le local… ce qui ne rendra les périples restants que plus savoureux !

Comparaison par POW du bilan carbone des trajets de Coline sur les deux dernières saisons :

Sur les 2 saisons, des trajets en voiture pour un total de 500km environ ont été effectués

Saison d’hiver 2022/2023

– Train : A/R de Grenoble à Innsbruck (798km) : 2,34kg CO2eq en TGV

– Train : A/R de Grenoble à Saint Anton Am Arlberg (767km) : 2,25 kg CO2eq en TGV

– Avion : A/R à Whistler (Canada) (8313km) : 1264 kg CO2eq

– Avion : A/R de Lyon à Tromso (Norvège) (2770km) : 520kg CO2eq

TOTAL : 1788,59 kg CO2eq

    Saison d’hiver 2023/2024

     – Train : 3 A/R de Grenoble à Innsbruck : 3 x 2,34 kg CO2eq en TGV = 7,02 kg CO2eq

    TOTAL : 7,02 kg CO2eq

    Le Mot de POW 

    Comment prendre la parole en tant qu’athlète sur des enjeux environnementaux, quand on n’est pas parfait ?

    Une large question auxquelles une réponse simple convenant à tout le monde n’existe sans doute pas pour des personnes qui vivent des ces pratiques, face à une audience plurielle. Le problème, c’est qu’en l’absence de réponse unique, l’issue est souvent celle de ne pas le faire. Ne pas prendre la parole malgré une envie, malgré des convictions, malgré un oeil alerte sur les changements qui ont lieu.
    Alors comment on fait ? Chez POW, on pense que notre rôle, c’est à la fois d’être présent et alerte pour pointer du doigt les comportements et manquements vis-à-vis des enjeux climatiques des uns, tout se tenant disponible pour accompagner chaque volonté de prendre la parole et d’évoluer avec sincérité des autres.
    La clé pour débloquer un tel dilemme : la transparence.

    Dans un monde où les réseaux sociaux sont omniprésents – que cela nous plaise ou non – prendre la parole sur des pratiques et engagements écologiques est essentiel, pour contrebalancer l’influence néfaste pour le climat de personnes sans connaissances ou sans scrupules. Récemment, nous étions avec la chercheuse Garance Bazin lors de la Convention POWpulaire du mois de mai, qui a publié une étude nommée : «EN MODE AVION» L’emprise de la publicité et des influenceurs.
    Elle démontre comment l’impact des réseaux sociaux font affluer les mauvaises pratiques, même chez des publics plutôt sensibilisés aux enjeux.
    L’idée dans tout ça, ce n’est pas que les athlètes remplacent les instagrameurs voyages, mais d’accepter collectivement que des personnes non parfaites prennent la parole malgré le fait que ces derniers prennent encore l’avion, que ce soit pour parler de leurs pratiques quand elles apparaissent plus vertueuses, ou quand il s’agit de porter une voix plus forte en faveur de mesures écologiques, comme la taxation du kérosène et le développement du ferroviaire.
    Oui, quand on fait des efforts au quotidien, on ne veut pas qu’un ou une athlète viennent “donner des leçons”. Mais ce n’est pas l’intention de la plupart des personnes avec qui échangent POW, bien au contraire. Cet aspect est si souvent une crainte, que c’est un frein à la moindre prise de parole.
    Aujourd’hui, il ne faut pas réclamer de la perfection dans les efforts, mais de la transparence et de la sincérité. Si ces critères sont réunis, il est parfaitement entendable qu’un individu dénonce l’impact de l’avion qui est impossible à remettre en cause (et chez POW le sujet de la mobilité, debout sur la table que sous le tapis) et des politiques publiques qui ne vont pas dans le bon sens. On peut parfaitement dénoncer que le kérosène ne soit pas taxé, tout en prenant l’avion car encore nécessaire ou compliqué à éviter pour des professionnels.
    POW s’engage à accompagner chaque athlète qui souhaiterait être accompagné dans une démarche de prise de parole. On a vraiment besoin que toutes les énergies sensibles à ces questions se battent dans le même sens, que chacun accepte de jouer les cartes qu’il a en main.

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    1. Selon le rapport Faire sa part de Carbone 4 par exemple, est mentionné le chiffre de 2 tonnes CO2eq, mais ce n’est pas un chiffre exact à atteindre, mais plutôt un cap pour se rendre compte que nos empreintes actuelles ne sont pas compatibles .

    Exemples de victoires Européennes !

    Exemples de victoires Européennes !

    L’une des raisons principales qui nous a motivé à créer la campagne RIDE BIKE CLIMB VOTE avec POW Europe, c’est que le Parlement Européen est vraiment une clé pour l’environnement, un endroit où l’on peut obtenir des victoires ! Ces dernières années le Parlement Européen est monté (doucement mais sûrement on l’espère) en puissance sur les sujets environnementaux. Mais il reste énormément à faire et l’équilibre est fragile à l’approche de ce nouveau mandat, alors on vous propose de faire un focus sur une poignée de victoires récentes avec des pistes de batailles que l’on espère remporter/faire avancer dans les années à venir. De quoi (se) motiver autour de soi à aller voter dimanche !

    La Loi Restauration de la nature

    Elle fixe comme objectif de restaurer au moins 20% des terres et des mers de l’UE d’ici 2030 et l’ensemble des écosystèmes ayant besoin d’être restaurés d’ici 2050. Elle devrait permettre de “restaurer les écosystèmes dégradés dans tous les pays de l’UE, de contribuer à la réalisation des objectifs de l’UE en matière de climat et de biodiversité et d’améliorer la sécurité alimentaire.”
    Pour aller plus loin

    L’interdiction de la vente de véhicules thermiques d’ici 2035 
    Si cela paraît loin, l’interdiction de la vente de véhicules thermiques est une bonne nouvelle, et un marqueur fort pour la transition de l’automobile mais plus généralement pour la transition des transports.
    On aura l’occasion d’en reparler chez POW, mais beaucoup de choses peuvent se passer d’ici là. La mesure est remise en cause par beaucoup de gens, et si des victoires peuvent s’obtenir, elles peuvent aussi se perdre si la tendance au Parlement bascule dans le mauvais sens.
    Pour aller plus loin 

    L’inscription du crime d’écocide dans la législation européenne

    Cette directive est un symbole fort et un marqueur juridique majeur et inédit.
    La directive o
    blige les Etats membres à condamner pénalement une gamme étendue d’infractions, comme le commerce illégal du bois ou l’épuisement des ressources en eau. Cela peut aller jusqu’à 5% du chiffre d’affaires annuel ou 40 millions d’euros.
    Votée le 27 février, c’est encore trop récent pour observer la moindre conclusion puisque les Etats membres ont 2 ans pour transposer ces règles dans leurs législations nationales.
    Pour aller plus loin

    La résolution contre l’exploitation minière des fonds marins en Norvège

    Un sujet loin de la montagne, mais qui est l’un des symboles incarnant le plus au niveau européen une victoire citoyenne. Car c’est bien grâce à une mobilisation majeure d’ONG et de citoyens que le sujet a pu être présent sur la table et que la bascule s’est faite.
    Le Parlement Européen a voté en faveur d’une résolution sur la décision de la Norvège d’autoriser l’exploitation des fonds marins (qui n’est pas membre de l’Union Européenne). Tous les pays sont appelés à soutenir un moratoire internationale. 
    Si le sujet vous intéresse, n’hésitez pas à suivre des acteurs au coeur du sujet comme l’ONG Bloom. Récemment, une coalition citoyenne pour la protection de l’océan s’est créée.
    Pour aller plus loin 

    Ce ne sont que quelques exemples, des victoires il y en a eu d’autres. Surtout, on en attend encore beaucoup dans les années à venir ! Quelques exemples de sujets sur lesquels le Parlement Européen a le pouvoir

    Sur le transport, notre sujet phare, le Parlement peut faire beaucoup de choses, avec le pouvoir de faire avancer les choses à l’échelle de tous les pays pour davantage de justice sociale (comme sur les taxes) ou davantage de synergie (comme sur les trains pour le report modal).
    Dans les années à venir, on plaidera pour :

    – Une taxation du Kérosène des avions pour investir des milliards dans des transports moins carbonés et rééquilibrer la balance avion vs train

    – Soutenir massivement le transport ferroviaire en Europe, notamment pour que l’on voit émerger un réseau de train de nuit bien plus important

    Le Parlement, c’est aussi le pouvoir d’agir à grande échelle pour une justice sociale plus juste en taxant les ultras riches, les superprofits et les pratiques les plus polluantes qui vont avec (jets privés, yachts, produits de luxe).
    C’est aussi la possibilité d’interdire définitivement les PFAS, le Glyphosate et autres produits dangereux. Le Parlement Européen a un réel impact nos vies, malgré l’inertie de ces décisions ou l’opacité sur ce qu’il s’y passe.
    Les années à venir seront décisives, beaucoup d’objectifs sont à atteindre pour 2030. Le Parlement qui sera élu ce dimanche, c’est donc celui qui fera en sorte que ces objectifs soient atteints ou non d’ici la fin de la décennie. De quoi se motiver pour mettre le bureau de vote sur le trajet de sa balade dimanche non ?

    Dernière chose : en tant qu’ONG, beaucoup de choses se jouent. Quoi qu’il arrive, le travail de POW et de toutes les assos continuera. Mais ce dimanche, on a l’occasion de se faciliter un tout petit peu le travail. On ne va pas choisir qui fera ou ne fera pas. On va choisir avec qui on va discuter ou contre qui on va devoir se battre dans les 5 années à venir.

    Elections Européennes : les meilleurs arguments pour aller voter

    Elections Européennes : les meilleurs arguments pour aller voter

    Elections Européennes : les meilleurs arguments pour aller voter

    Le 9 juin auront lieu les Élections Européennes, une échéance majeure pour la suite de la décennie et d’une importance colossale pour les sujets environnementaux. Si vous nous suivez depuis un moment, vous savez que chez POW on assume clairement se mêler de la politique : on encourage au vote, on parle des scrutins, on pointe notre doigt sur les (in)actions politiques, on sollicite, on interpelle et on donne des outils à la communauté lorsqu’une occasion sur un sujet se présente pour que vous puissiez nous aider et agir avec nous. La raison à tout cela est simple : l’écologie est politique. Alors on le fait toujours de façon non-partisane, c’est-à-dire que jamais on ne prônera un parti en particulier. Chacun vote avec ces convictions, et on se dit que si vous nous suivez, on en partage un certain nombre ! Mais si l’on ne parle pas des échéances politiques, on ne se focalise que sur les petits gestes individuels, une direction qui n’est pas la nôtre. C’est pour ça qu’aujourd’hui, on vous partage une batterie d’arguments pour vous convaincre ou vous aider à convaincre autour de vous de l’importance des Elections Européennes !

    • ➡️ Les prochaines Européennes auront lieu à la fin de la décennie, donc c’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de décider qui va voter les législations européennes. Ce qui se joue le 9 juin aura un impact durant des années. Quand on sait que chaque jour compte dans la lutte contre le réchauffement climatique…
    • ➡️ C’est au Parlement Européen qu’on a eu les plus grandes victoires en faveur du climat ces dernières années. Alors que ce n’est pas la joie à échelle nationale, avoir une Europe qui pousse un peu l’ambition climatique, ce serait loin d’être du luxe… Les victoires, on vous en parle bientôt sur nos réseaux et ici dans un nouvel article!
    • ➡️ Les Elections Européennes donnent souvent place à une abstention très forte. Une raison de plus pour se mobiliser ! moins de gens votent, plus notre vote a du poids ! En plus, contrairement à la présidentielle, ici on vote pour des listes. Selon chaque pourcentage, chaque liste aura (sauf si en-dessous de 5%) un certain nombre d’eurodéputés. Ce qui veut dire que chaque vote peut faire pencher la balance pour qu’il y ait un député de plus d’un côté, un de moins de l’autre… Ce qui est d’autant plus important que souvent les votes sont très serrés au Parlement !
    • ➡️ En France, notre vote a un poids énorme puisqu’on est le 2ème pays à élire le plus d’eurodéputés derrière l’Allemagne, avec 81 élus (On en parle dans un post Instagram dédié ici). On représente sans doute le pays qui a le plus d’influence en Europe dans les échanges. Ce serait mieux de ne pas y envoyer trop de gens qui se fichent royalement du climat non ?
    • ➡️ On estime à 190 millions de personnes faisant partie de ce qu’on pourrait appeler “la communauté outdoor” en Europe. C’est environ le nombre de personnes qui ont voté en 2019. Les passionnées de montagnes, de forêts, d’océans, sont largement suffisamment nombreux pour faire pencher la balance dans la direction de la protection de ces espaces naturels. Suffit de se motiver les uns et les autres !

    Des arguments, il y en a encore d’autres ! Jusqu’à la veille du 9 juin, on va tâcher de partager du contenu sur les réseaux pour essayer de convaincre un maximum de personnes de se déplacer aux urnes pour voter en faveur de gens qui défendent le climat. Pour ça on a besoin de vous, alors partagez autour de vous !

    On ne sait pas vivre sans glaciers

    On ne sait pas vivre sans glaciers

    On ne sait pas vivre sans glaciers, génétiquement, on n’a pas ça dans notre ADN. Si on perd les glaciers, on va vers quelque chose où l’on sort complètement des radars de l’histoire de l’humanité, de l’histoire récente du vivant sur la planète, et on prend quand même des gros risques.

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    En 2050, à cause des émissions de gaz à effet de serre, tous les glaciers des Pyrénées et 34% du volume de glace dans les Alpes européennes auront disparu. Quelles sont alors les conséquences de la fonte des glaciers ? Biodiversité, écosystèmes, ressources, territoires, populations… Les conséquences semblent être multiples

    Bien que les glaciers nous paraissent parfois lointains, nous sommes intimement liés à eux, et leur fonte extrêmement rapide et massive est un phénomène inédit auquel nous devons prêter la plus grande attention comme le dit si bien Jean-Baptiste Bosson.

    Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est important de rappeler qu’il s’agit de parler des glaciers condamnés et dont la fonte à grande échelle est inévitable. Il reste de nombreux glaciers de montagne à préserver.

    Sommaire des enjeux abordés dans l’article :

    • Un bouleversement de la biodiversité et des écosystèmes
    • Des sécheresses à répétition et une gestion de l’eau perturbée
    • Faire face à une instabilité climatique en montagne et dans les pratiques
    • Les glaciers, de véritables régulateurs du climat
    • Comment sommes-nous liés aux glaciers ?
    Un bouleversement de la biodiversité et des écosystèmes

    Le recul des glaciers de montagne affecte tout d’abord la nature elle-même, avec toute sa biodiversité et ses écosystèmes. D’après le GIEC, la composition et l’abondance des espèces de montagne ont considérablement changé avec la réduction des couvertures neigeuse et glaciaire. Les espèces locales sont de plus en plus menacées, notamment pour celles qui dépendent directement de la glace. Quand les glaciers disparaissent, c’est tout un habitat naturel qui disparaît avec eux : c’est le cas notamment du petit invertébré tardigrade qui vit auprès des glaciers.

    Comme nous le rappelle Jean-Baptiste Bosson, “La nature a horreur du vide. Si on perd quelque chose d’un côté, on gagne quelque chose de l’autre”. Là où vivaient les glaciers auparavant, on observe l’apparition de nouveaux habitats vêtus de cailloux de sédiments, de nouvelles rivières, de nouveaux lacs, de nouvelles pelouses… ainsi que l’arrivée de nouvelles espèces dans ces zones comme le cerf, ayant besoin de forêt pour vivre.

    Mais ce phénomène ramène de la compétition entre les espèces avec le développement d’espèces “exotiques” envahissantes pour celles déjà installées depuis longtemps. La fonte des glaciers questionne donc les différentes habitabilités de la Terre et tend à bouleverser la biodiversité actuelle.

    Des sécheresses à répétition et une gestion de l’eau Perturbée

    Les glaciers permettent de réguler le courant des rivières qui va inévitablement être perturbé par leur fonte. Sur le long terme, comme la régénération glaciaire est réduite, le volume d’eau qui coule dans les rivières de montagne sera de plus en plus faible et rendra les périodes de sécheresse de plus en plus intenses.

    « Les glaciers sont comme un immense compte en banque à la base, qui se superpose au cycle de l’eau. Ce compte en banque devient très petit et de ce fait, les débits diminuent parce qu’on perd de ce surplus qu’était le stock. »

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    Cette image est frappante et nous invite à économiser drastiquement ce stock. Au vu des sécheresses de l’été 2022 et de l’hiver 2023, cet enjeu est de la plus haute importance. Les glaciers de montagne sont les châteaux d’eau de nombreuses régions du monde, et permettent de mettre en place l’irrigation et l’énergie hydro-électrique. Tous ces phénomènes vont être affectés et avoir des impacts sur nos usages quotidiens, sur l’agriculture, ainsi que sur l’électricité, en touchant en priorité les populations locales.

    Selon les années, les glaciers des Alpes représentent environ 40% du débit du Rhône. Sans glaciers, le débit du Rhône tend à diminuer drastiquement, surtout en été où le besoin en eau est le plus important. La vallée du Rhône, avec environ 12 000 000 habitants et une grande zone de production maraîchère, va être fragilisée. De plus, l’eau sera de plus en plus chaude et les centrales électriques seront plus difficiles à refroidir.

    En mars 2023, le lac des Bouillouses dans les Pyrénées-Orientales, alimenté par les précipitations et les glaciers, a vu stopper sa production hydroélectrique par manque d’eau. L’eau et les glaciers sont une richesse énergétique essentielle, aujourd’hui mise en péril. Et pour en savoir plus sur les glaciers des Pyrénées, retrouve notre article sur le sujet ici.

    Faire face à une instabilité climatique en montagne et dans les pratiques

    L’été, les fortes chaleurs et la fonte des glaciers accélérée engendrent une hausse du débit des rivières. En été 2023, cela a été difficile pour certains refuges, notamment dans les Ecrins. Alors que certains ont fermé par manque d’eau, la fonte des glaciers combinée à des orages violents ont provoqué des crues torrentielles comme au refuge Châtelleret dans l’Oisans où certaines installations ont été endommagées par un torrent de boue emportant avec lui d’énormes blocs de pierre. Ces crues-là sont amenées à se répéter, provoquant un risque récurrent à prendre en compte.

    Les glaciers représentent un héritage culturel précieux dans nos vallées. L’effondrement de ce patrimoine naturel va avoir des effets néfastes sur nos pratiques en montagne qu’il est nécessaire de réinventer. En termes de sécurité, certains itinéraires deviennent dangereux dû à des éboulements dévastateurs. On se rappelle de l’effondrement d’une partie du glacier de la Marmolada en Italie en 2022 qui a provoqué la mort de plusieurs personnes. En France la même année, l’accès au couloir du Goûter pour l’ascension du Mont Blanc était interdite à cause de chutes de pierres dues à l’assèchement du couloir. Dans certaines régions, des pratiques sont amenées à disparaître : le club alpin français de Perpignan n’a pas pu organiser de sorties de cascade de glace en 2024 comme c’était le cas auparavant. 

    Il est aussi important de relever que les activités en montagne sont directement liées au tourisme et à l’économie locale, qui risquent également de souffrir de la fonte des glaciers qui inquiète notamment les guides de haute montagne.

    Luc Moreau

    Arthur Vaillant

    Les glaciers : de véritables régulateurs de climat

    Les glaciers, en couvrant 10% des terres émergées de la planète, ont un véritable rôle de régulateurs du climat. Connu sous le nom d’effet albédo, leur surface blanche contribue à renvoyer une grande majorité du rayonnement solaire et à réguler le réchauffement planétaire et leur fonte. Pour en savoir plus, retrouve notre article sur le lien entre neige et glace ici.

    « La température de l’eau des rivières sur plus que 100 km, en s’éloignant des glaciers du  Massif du Mont-Blanc, est encore de 13° alors que les autres rivières sans glaciers autour ont une température de l’eau d’environ 20°. » Ce que veut nous dire Jean-Baptiste Bosson, c’est que les glaciers permettent de créer des microclimats, auxquelles on s’est habitués et sur lesquels on s’est développés, en ventilant et rafraîchissant tout une vallée par exemple. 

    Ils permettent aussi aux scientifiques de surveiller les évolutions du climat. En effet, la neige, en se compactant pour devenir de la glace, va piéger des bulles d’air. En les analysant, nous pouvons connaître l’histoire du climat avec la composition de l’atmosphère depuis 800 000 ans.

    Les glaciers sont nos meilleurs alliés pour comprendre ce qui s’est passé jusqu’à maintenant depuis les 800 000 dernières années.

    Et sans l’Homme, il n’y a pas de changement climatique profond en ce moment sur Terre. Aujourd’hui, aucun pays ne respecte ses engagements climatiques et ne comprend l’urgence de l’enjeu. Il y a un boulot énorme à faire et on écoute pas assez cette voix des glaciers.

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    Leur perte signifie une réduction des données disponibles pour observer les futurs changements du climat à l’échelle locale, alerter sur ces derniers et les anticiper. Et, rappelons-le, le travail des scientifiques est primordial pour nous permettre d’agir sur le changement climatique et anticiper au maximum. Ce dont ils témoignent n’est pas le fruit d’un changement naturel mais bien d’un changement dû activités humaines qu’il est essentiel de prendre en compte. Ce que l’on vit est inédit et doit nous alerter quant aux nouvelles conditions d’habitabilité de l’humain sur la planète Terre. Peut-être est-ce dans l’écoute de ce que les glaciers ont à nous dire que nous devons user de nos efforts ?

    Comment sommes-nous liés aux glaciers ?

    Les glaciers, les forêts, les animaux, n’importe quoi qui te connecte à la nature, plus tu t’y connecte, plus ça s’horizontalise, et tu te rends compte que tu fais partie de cette bonne histoire des glaciers. Mais les glaciers, comme le phoque, comme la petite fleur qui pousse sur ton balcon, la biodiversité, le vivant, le non vivant sur Terre, tout ce qui nous entoure, tout cela nous rattache à l’histoire de la vie, au cosmos, à nos enfants qui arriveront après nous, ça nous connecte à une grande ligne qui parle d’un passé lointain et qui va très loin dans le futur et dans laquelle on est un tout petit maillon. 1

    Jean Baptiste Bosson, glaciologue

    Depuis l’existence de l’homo sapiens il y a 300 000 ans, les grands glaciers ont toujours été présents en influançant le climat dans lequel on vit et dans lequel on a développé notre habitabilité. Sans glaciers, la température de la Terre serait beaucoup plus élevée et le niveau marin beaucoup plus haut.Comme mentionné au début de l’article, pour Jean-Baptiste, c’est très clair : “On ne sait pas vivre sans glacier, génétiquement, on n’a pas ça dans notre ADN. Si on perd les glaciers, on va vers quelque chose où l’on sort complètement des radars de l’histoire de l’homme, de l’histoire récente du vivant sur la planète et on prend quand même des gros risques.”

    Parce que c’est aussi cela, ressentir les conséquences de la fonte des glaciers, c’est nous questionner sur leur place dans ce monde et son rôle important, plus encore que notre propre existence. Ils sont avant nous habitants et composantes de la Terre, mais souffrent d’autant plus de ce réchauffement climatique qui nous accable. Qu’attendons-nous pour écouter cette voix qui nous alerte ?

    Il est urgent d’agir pour préserver les glaciers qui résistent encore aux effets du changement climatique, ce qui ne se fera pas sans une volonté collective et politique forte dans le sens de la réduction des émissions de gaz à effets de serre.

    Par Nicolas Vaillant, bénévole La Voix des Glaciers.


    1. Réflexion inspirée de la mention du livre de Bernadette Bensaude-Vincent intitulé “Temps-paysage: Pour une écologie des Crises”. Elle nous invite à penser l’humain et le non-humain -vivant et non vivant- sur une même échelle. A savoir que nous sommes tous composés de lignes et que l’enchevêtrement de ces lignes forme notre existentialité au sein même du paysage. Il s’agit alors de sortir de notre situation surplombante pour nous plonger dans l’immanence et reconsidérer ce qui nous entoure, ici la nature..