“Protéger l’outdoor, c’est politique”

“Protéger l’outdoor, c’est politique”

 Défendre l’outdoor, c’est politique. C’est s’engager. S’engager pour le vivant, la biodiversité, et pour mieux vivre ensemble. 

C’est la mission de Protect Our Winters en France depuis sa création, notre ADN : “ porter et amplifier la voix de la communauté outdoor en faveur du climat, du vivant et de la justice sociale.Le cœur de notre travail consiste donc à lutter, avec vous, en faveur de changements systémiques, pour qu’ensemble nous obtenions des politiques publiques à la hauteur des enjeux climatiques et sociaux.

 

La société que nous défendons est une société bas-carbone et juste. 

Elle a besoin d’engagements environnementaux forts sur le climat, la mobilité, les espaces naturels et la transition énergétique. Elle a besoin d’accompagner ses citoyen.nes les plus fragiles et de responsabiliser celleux qui en ont les moyens et le devoir.

Elle a besoin d’abolir une violence devenue systémique pour plus d’humanité dans nos relations sociales.

 

Cette société ne peut pas exister avec un gouvernement d’extrême droite.

Un gouvernement prêt à revenir en arrière sur presque tous les sujets environnementaux. Un gouvernement dangereux sur la question du droit des femmes et plus largement des minorités, et prêt à remettre en cause des libertés fondamentales. Un gouvernement dont les responsables politiques ont systématiquement voté, ces dernières années, à Paris comme à Strasbourg, à l’encontre des combats que nous portons: développement des énergies renouvelables, taxation du kérosène,  Loi sur la restauration de la nature, Zéro Artificialisation Nette, taxation des supers profits, restauration de l’ISF, interdiction des PFAS…et la liste est longue.

 

Il faut donc faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher cette éventualité. Se battre sur le terrain politique. Car protéger l’outdoor, c’est politique, plus que jamais. 

Il y a urgence à ce que chacun.e d’entre nous se sente investi.e de cette responsabilité et de ce pouvoir politique, en retrouvant le chemin des urnes pour faire advenir cette société à laquelle nous aspirons. En fait, aujourd’hui, c’est la seule action qui compte vraiment. Car sans cela, tous nos efforts, individuels ou associatifs, seront vains. 

 

Nous appelons notre communauté – au sens le plus large – les passionné.es de sport et de pratiques en pleine nature, les amoureux.ses de la montagne et des espaces naturels, depuis les habitant.es de ces derniers jusqu’à celleux qui ne voient les sommets que trop peu à leur goût, ou tout simplement tous celleux qui souhaitent que les futures générations puissent respirer et pratiquer des activités dehors à se mobiliser. Tous ces gens, c’est vous, c’est nous ! Nous avons un pouvoir, prenons-le !  Emparons-nous du sujet, prenons la parole, sensibilisons autour de nous, et avant tout allons voter le 30 Juin et le 7 juillet prochains pour faire rempart à l’extrême droite et défendre nos convictions.

 

Soyez assuré.es que de notre côté on ne lâchera rien. Le mouvement Protect Our Winters continuera toujours de lutter en faveur d’une société bas-carbone et juste. 

 

Ride. Bike. Climb. VOTE

Une saison sans avion  le témoignage de Coline Ballet-Baz

Une saison sans avion le témoignage de Coline Ballet-Baz

Le récit de Coline

Cela faisait quelques années que l’envie de ne plus prendre l’avion me trottait dans la tête, par conviction écologique. Et j’ai décidé au début de cette saison d’hiver 23/24 de mettre cette envie en pratique, pour voir par moi-même si tous les freins pré-supposés à cette démarche étaient fondés, ou pas : peur de mécontenter certains sponsors, de manquer certaines opportunités pour filmer ou de ne plus être invitée sur certains évènements importants… Grosso modo peur de ne plus pouvoir continuer ce métier en arrêtant de prendre l’avion.

Au final cette annonce a été très bien reçue par les marques et personnes avec lesquelles je travaille, la saison a été remplie de tournages pour divers projets dans nos merveilleuses Alpes (qui plus est bien enneigées cette saison !), le budget et la fatigue dus aux longs trajets en avion et décalages horaires qui s’en suivent ont été remplacés par plus de temps en montagne et sur les skis 🙂

Loin de moi l’envie de porter un jugement sur les personnes qui voyagent en avion avec ce texte, nous n’avons pas tous.tes les mêmes réalités, je l’ai moi-même beaucoup pris à l’époque des compétitions internationales, et surtout le système écocidaire qui ne prévoit pas de taxe sur kérosène des avions, fait qu’il est malheureusement souvent beaucoup plus abordable de prendre l’avion plutôt que le train. POW a fait un post sur le comparatif train/avion, à partir d’un rapport de Greenpeace.

Mais cette démarche fait sens pour moi à plusieurs niveaux : diminuer mon bilan carbone de femme française bien au-delà des limites qui pourraient être fixées pour rester dans les Accords de Paris 1 ; ralentir le rythme parfois trop effréné de nos vies occidentales ; apaiser un peu les contradictions environnementales liées à ma pratique professionnelle du ski (il en reste encore !) ; apprendre à plus connaître les montagnes autour de chez nous, leur nivologie, leur évolution au fil d’une saison d’hiver ; diminuer la logistique et les coûts énormes liés aux déplacements en avion ; rêvasser en musique derrière la vitre d’un train plutôt que d’attendre dans les files interminables des contrôles de bagages… 

Envisager les futures saisons de cette manière me rend très heureuse et apaisée, continuer à prévoir des tournages pour le ski et des aventures en montagne dans un périmètre accessible en train ou en voiture, en réduisant peut-être la fréquence de ces voyages et en prenant plus de temps pour le local… ce qui ne rendra les périples restants que plus savoureux !

Comparaison par POW du bilan carbone des trajets de Coline sur les deux dernières saisons :

Sur les 2 saisons, des trajets en voiture pour un total de 500km environ ont été effectués

Saison d’hiver 2022/2023

– Train : A/R de Grenoble à Innsbruck (798km) : 2,34kg CO2eq en TGV

– Train : A/R de Grenoble à Saint Anton Am Arlberg (767km) : 2,25 kg CO2eq en TGV

– Avion : A/R à Whistler (Canada) (8313km) : 1264 kg CO2eq

– Avion : A/R de Lyon à Tromso (Norvège) (2770km) : 520kg CO2eq

TOTAL : 1788,59 kg CO2eq

    Saison d’hiver 2023/2024

     – Train : 3 A/R de Grenoble à Innsbruck : 3 x 2,34 kg CO2eq en TGV = 7,02 kg CO2eq

    TOTAL : 7,02 kg CO2eq

    Le Mot de POW 

    Comment prendre la parole en tant qu’athlète sur des enjeux environnementaux, quand on n’est pas parfait ?

    Une large question auxquelles une réponse simple convenant à tout le monde n’existe sans doute pas pour des personnes qui vivent des ces pratiques, face à une audience plurielle. Le problème, c’est qu’en l’absence de réponse unique, l’issue est souvent celle de ne pas le faire. Ne pas prendre la parole malgré une envie, malgré des convictions, malgré un oeil alerte sur les changements qui ont lieu.
    Alors comment on fait ? Chez POW, on pense que notre rôle, c’est à la fois d’être présent et alerte pour pointer du doigt les comportements et manquements vis-à-vis des enjeux climatiques des uns, tout se tenant disponible pour accompagner chaque volonté de prendre la parole et d’évoluer avec sincérité des autres.
    La clé pour débloquer un tel dilemme : la transparence.

    Dans un monde où les réseaux sociaux sont omniprésents – que cela nous plaise ou non – prendre la parole sur des pratiques et engagements écologiques est essentiel, pour contrebalancer l’influence néfaste pour le climat de personnes sans connaissances ou sans scrupules. Récemment, nous étions avec la chercheuse Garance Bazin lors de la Convention POWpulaire du mois de mai, qui a publié une étude nommée : «EN MODE AVION» L’emprise de la publicité et des influenceurs.
    Elle démontre comment l’impact des réseaux sociaux font affluer les mauvaises pratiques, même chez des publics plutôt sensibilisés aux enjeux.
    L’idée dans tout ça, ce n’est pas que les athlètes remplacent les instagrameurs voyages, mais d’accepter collectivement que des personnes non parfaites prennent la parole malgré le fait que ces derniers prennent encore l’avion, que ce soit pour parler de leurs pratiques quand elles apparaissent plus vertueuses, ou quand il s’agit de porter une voix plus forte en faveur de mesures écologiques, comme la taxation du kérosène et le développement du ferroviaire.
    Oui, quand on fait des efforts au quotidien, on ne veut pas qu’un ou une athlète viennent “donner des leçons”. Mais ce n’est pas l’intention de la plupart des personnes avec qui échangent POW, bien au contraire. Cet aspect est si souvent une crainte, que c’est un frein à la moindre prise de parole.
    Aujourd’hui, il ne faut pas réclamer de la perfection dans les efforts, mais de la transparence et de la sincérité. Si ces critères sont réunis, il est parfaitement entendable qu’un individu dénonce l’impact de l’avion qui est impossible à remettre en cause (et chez POW le sujet de la mobilité, debout sur la table que sous le tapis) et des politiques publiques qui ne vont pas dans le bon sens. On peut parfaitement dénoncer que le kérosène ne soit pas taxé, tout en prenant l’avion car encore nécessaire ou compliqué à éviter pour des professionnels.
    POW s’engage à accompagner chaque athlète qui souhaiterait être accompagné dans une démarche de prise de parole. On a vraiment besoin que toutes les énergies sensibles à ces questions se battent dans le même sens, que chacun accepte de jouer les cartes qu’il a en main.

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    1. Selon le rapport Faire sa part de Carbone 4 par exemple, est mentionné le chiffre de 2 tonnes CO2eq, mais ce n’est pas un chiffre exact à atteindre, mais plutôt un cap pour se rendre compte que nos empreintes actuelles ne sont pas compatibles .

    On ne sait pas vivre sans glaciers

    On ne sait pas vivre sans glaciers

    On ne sait pas vivre sans glaciers, génétiquement, on n’a pas ça dans notre ADN. Si on perd les glaciers, on va vers quelque chose où l’on sort complètement des radars de l’histoire de l’humanité, de l’histoire récente du vivant sur la planète, et on prend quand même des gros risques.

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    En 2050, à cause des émissions de gaz à effet de serre, tous les glaciers des Pyrénées et 34% du volume de glace dans les Alpes européennes auront disparu. Quelles sont alors les conséquences de la fonte des glaciers ? Biodiversité, écosystèmes, ressources, territoires, populations… Les conséquences semblent être multiples

    Bien que les glaciers nous paraissent parfois lointains, nous sommes intimement liés à eux, et leur fonte extrêmement rapide et massive est un phénomène inédit auquel nous devons prêter la plus grande attention comme le dit si bien Jean-Baptiste Bosson.

    Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est important de rappeler qu’il s’agit de parler des glaciers condamnés et dont la fonte à grande échelle est inévitable. Il reste de nombreux glaciers de montagne à préserver.

    Sommaire des enjeux abordés dans l’article :

    • Un bouleversement de la biodiversité et des écosystèmes
    • Des sécheresses à répétition et une gestion de l’eau perturbée
    • Faire face à une instabilité climatique en montagne et dans les pratiques
    • Les glaciers, de véritables régulateurs du climat
    • Comment sommes-nous liés aux glaciers ?
    Un bouleversement de la biodiversité et des écosystèmes

    Le recul des glaciers de montagne affecte tout d’abord la nature elle-même, avec toute sa biodiversité et ses écosystèmes. D’après le GIEC, la composition et l’abondance des espèces de montagne ont considérablement changé avec la réduction des couvertures neigeuse et glaciaire. Les espèces locales sont de plus en plus menacées, notamment pour celles qui dépendent directement de la glace. Quand les glaciers disparaissent, c’est tout un habitat naturel qui disparaît avec eux : c’est le cas notamment du petit invertébré tardigrade qui vit auprès des glaciers.

    Comme nous le rappelle Jean-Baptiste Bosson, “La nature a horreur du vide. Si on perd quelque chose d’un côté, on gagne quelque chose de l’autre”. Là où vivaient les glaciers auparavant, on observe l’apparition de nouveaux habitats vêtus de cailloux de sédiments, de nouvelles rivières, de nouveaux lacs, de nouvelles pelouses… ainsi que l’arrivée de nouvelles espèces dans ces zones comme le cerf, ayant besoin de forêt pour vivre.

    Mais ce phénomène ramène de la compétition entre les espèces avec le développement d’espèces “exotiques” envahissantes pour celles déjà installées depuis longtemps. La fonte des glaciers questionne donc les différentes habitabilités de la Terre et tend à bouleverser la biodiversité actuelle.

    Des sécheresses à répétition et une gestion de l’eau Perturbée

    Les glaciers permettent de réguler le courant des rivières qui va inévitablement être perturbé par leur fonte. Sur le long terme, comme la régénération glaciaire est réduite, le volume d’eau qui coule dans les rivières de montagne sera de plus en plus faible et rendra les périodes de sécheresse de plus en plus intenses.

    « Les glaciers sont comme un immense compte en banque à la base, qui se superpose au cycle de l’eau. Ce compte en banque devient très petit et de ce fait, les débits diminuent parce qu’on perd de ce surplus qu’était le stock. »

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    Cette image est frappante et nous invite à économiser drastiquement ce stock. Au vu des sécheresses de l’été 2022 et de l’hiver 2023, cet enjeu est de la plus haute importance. Les glaciers de montagne sont les châteaux d’eau de nombreuses régions du monde, et permettent de mettre en place l’irrigation et l’énergie hydro-électrique. Tous ces phénomènes vont être affectés et avoir des impacts sur nos usages quotidiens, sur l’agriculture, ainsi que sur l’électricité, en touchant en priorité les populations locales.

    Selon les années, les glaciers des Alpes représentent environ 40% du débit du Rhône. Sans glaciers, le débit du Rhône tend à diminuer drastiquement, surtout en été où le besoin en eau est le plus important. La vallée du Rhône, avec environ 12 000 000 habitants et une grande zone de production maraîchère, va être fragilisée. De plus, l’eau sera de plus en plus chaude et les centrales électriques seront plus difficiles à refroidir.

    En mars 2023, le lac des Bouillouses dans les Pyrénées-Orientales, alimenté par les précipitations et les glaciers, a vu stopper sa production hydroélectrique par manque d’eau. L’eau et les glaciers sont une richesse énergétique essentielle, aujourd’hui mise en péril. Et pour en savoir plus sur les glaciers des Pyrénées, retrouve notre article sur le sujet ici.

    Faire face à une instabilité climatique en montagne et dans les pratiques

    L’été, les fortes chaleurs et la fonte des glaciers accélérée engendrent une hausse du débit des rivières. En été 2023, cela a été difficile pour certains refuges, notamment dans les Ecrins. Alors que certains ont fermé par manque d’eau, la fonte des glaciers combinée à des orages violents ont provoqué des crues torrentielles comme au refuge Châtelleret dans l’Oisans où certaines installations ont été endommagées par un torrent de boue emportant avec lui d’énormes blocs de pierre. Ces crues-là sont amenées à se répéter, provoquant un risque récurrent à prendre en compte.

    Les glaciers représentent un héritage culturel précieux dans nos vallées. L’effondrement de ce patrimoine naturel va avoir des effets néfastes sur nos pratiques en montagne qu’il est nécessaire de réinventer. En termes de sécurité, certains itinéraires deviennent dangereux dû à des éboulements dévastateurs. On se rappelle de l’effondrement d’une partie du glacier de la Marmolada en Italie en 2022 qui a provoqué la mort de plusieurs personnes. En France la même année, l’accès au couloir du Goûter pour l’ascension du Mont Blanc était interdite à cause de chutes de pierres dues à l’assèchement du couloir. Dans certaines régions, des pratiques sont amenées à disparaître : le club alpin français de Perpignan n’a pas pu organiser de sorties de cascade de glace en 2024 comme c’était le cas auparavant. 

    Il est aussi important de relever que les activités en montagne sont directement liées au tourisme et à l’économie locale, qui risquent également de souffrir de la fonte des glaciers qui inquiète notamment les guides de haute montagne.

    Luc Moreau

    Arthur Vaillant

    Les glaciers : de véritables régulateurs de climat

    Les glaciers, en couvrant 10% des terres émergées de la planète, ont un véritable rôle de régulateurs du climat. Connu sous le nom d’effet albédo, leur surface blanche contribue à renvoyer une grande majorité du rayonnement solaire et à réguler le réchauffement planétaire et leur fonte. Pour en savoir plus, retrouve notre article sur le lien entre neige et glace ici.

    « La température de l’eau des rivières sur plus que 100 km, en s’éloignant des glaciers du  Massif du Mont-Blanc, est encore de 13° alors que les autres rivières sans glaciers autour ont une température de l’eau d’environ 20°. » Ce que veut nous dire Jean-Baptiste Bosson, c’est que les glaciers permettent de créer des microclimats, auxquelles on s’est habitués et sur lesquels on s’est développés, en ventilant et rafraîchissant tout une vallée par exemple. 

    Ils permettent aussi aux scientifiques de surveiller les évolutions du climat. En effet, la neige, en se compactant pour devenir de la glace, va piéger des bulles d’air. En les analysant, nous pouvons connaître l’histoire du climat avec la composition de l’atmosphère depuis 800 000 ans.

    Les glaciers sont nos meilleurs alliés pour comprendre ce qui s’est passé jusqu’à maintenant depuis les 800 000 dernières années.

    Et sans l’Homme, il n’y a pas de changement climatique profond en ce moment sur Terre. Aujourd’hui, aucun pays ne respecte ses engagements climatiques et ne comprend l’urgence de l’enjeu. Il y a un boulot énorme à faire et on écoute pas assez cette voix des glaciers.

    Jean-Baptiste Bosson, glaciologue

    Leur perte signifie une réduction des données disponibles pour observer les futurs changements du climat à l’échelle locale, alerter sur ces derniers et les anticiper. Et, rappelons-le, le travail des scientifiques est primordial pour nous permettre d’agir sur le changement climatique et anticiper au maximum. Ce dont ils témoignent n’est pas le fruit d’un changement naturel mais bien d’un changement dû activités humaines qu’il est essentiel de prendre en compte. Ce que l’on vit est inédit et doit nous alerter quant aux nouvelles conditions d’habitabilité de l’humain sur la planète Terre. Peut-être est-ce dans l’écoute de ce que les glaciers ont à nous dire que nous devons user de nos efforts ?

    Comment sommes-nous liés aux glaciers ?

    Les glaciers, les forêts, les animaux, n’importe quoi qui te connecte à la nature, plus tu t’y connecte, plus ça s’horizontalise, et tu te rends compte que tu fais partie de cette bonne histoire des glaciers. Mais les glaciers, comme le phoque, comme la petite fleur qui pousse sur ton balcon, la biodiversité, le vivant, le non vivant sur Terre, tout ce qui nous entoure, tout cela nous rattache à l’histoire de la vie, au cosmos, à nos enfants qui arriveront après nous, ça nous connecte à une grande ligne qui parle d’un passé lointain et qui va très loin dans le futur et dans laquelle on est un tout petit maillon. 1

    Jean Baptiste Bosson, glaciologue

    Depuis l’existence de l’homo sapiens il y a 300 000 ans, les grands glaciers ont toujours été présents en influançant le climat dans lequel on vit et dans lequel on a développé notre habitabilité. Sans glaciers, la température de la Terre serait beaucoup plus élevée et le niveau marin beaucoup plus haut.Comme mentionné au début de l’article, pour Jean-Baptiste, c’est très clair : “On ne sait pas vivre sans glacier, génétiquement, on n’a pas ça dans notre ADN. Si on perd les glaciers, on va vers quelque chose où l’on sort complètement des radars de l’histoire de l’homme, de l’histoire récente du vivant sur la planète et on prend quand même des gros risques.”

    Parce que c’est aussi cela, ressentir les conséquences de la fonte des glaciers, c’est nous questionner sur leur place dans ce monde et son rôle important, plus encore que notre propre existence. Ils sont avant nous habitants et composantes de la Terre, mais souffrent d’autant plus de ce réchauffement climatique qui nous accable. Qu’attendons-nous pour écouter cette voix qui nous alerte ?

    Il est urgent d’agir pour préserver les glaciers qui résistent encore aux effets du changement climatique, ce qui ne se fera pas sans une volonté collective et politique forte dans le sens de la réduction des émissions de gaz à effets de serre.

    Par Nicolas Vaillant, bénévole La Voix des Glaciers.


    1. Réflexion inspirée de la mention du livre de Bernadette Bensaude-Vincent intitulé “Temps-paysage: Pour une écologie des Crises”. Elle nous invite à penser l’humain et le non-humain -vivant et non vivant- sur une même échelle. A savoir que nous sommes tous composés de lignes et que l’enchevêtrement de ces lignes forme notre existentialité au sein même du paysage. Il s’agit alors de sortir de notre situation surplombante pour nous plonger dans l’immanence et reconsidérer ce qui nous entoure, ici la nature..

    Neige et glace : un lien étroit bouleversé par le changement climatique

    Neige et glace : un lien étroit bouleversé par le changement climatique

    Au début de l’année 2024, grâce au suivi réalisé par Simon Gascoin, on a observé un très faible enneigement dans tous les massifs montagneux du territoire français : le record du plus faible enneigement a été battu dans les Pyrénées et dans les Alpes. Si le manque de neige a un impact certain sur la pratique des sports d’hiver et le tourisme, on voulait aborder dans cet article le lien étroit qui existe entre la neige et les glaciers. Car si la fonte des glaciers est surtout visible en été, elle dépend fortement des chutes de neige hivernales.

    La couverture neigeuse 1 dans les Alpes françaises et suisses était de seulement 36% début février, un record depuis 1990. Dans les Pyrénées, la neige recouvrait 8% de l’intégralité du massif alors que 40% était recouvert un mois plus tôt. Le recul de l’enneigement est en moyenne de 12% par décennie dans les Alpes du Nord, 20% dans les Alpes du Sud et 7% dans les Pyrénées.

    L’évolution de l’enneigement dans les Alpes et les Pyrénées

    Une étude parue en 2021 a évalué l’évolution de l’enneigement depuis 1970 sur l’ensemble des Alpes. Elle met en évidence une perte de 14 à 20 cm de hauteur de neige en moyenne altitude (1000-2000 m). Dans les Alpes du Sud, l’enneigement a diminué d’environ 4 cm par décennie depuis 1970, et dans les Alpes du Nord, cette diminution est de l’ordre de 3 cm. 

    Pour aller un peu plus dans le détail, le Groupe Régional d’Experts sur le Climat dans la région PACA (GREC Sud) a synthétisé les données de cette étude pour les Alpes du Sud. En moyenne altitude, il a été constaté une perte de près d’un mois d’enneigement depuis 50 ans. Depuis 1970, l’épaisseur moyenne de la couche neigeuse a diminué d’environ 10 cm en dessous de 1000 m, et de près de 20 cm entre 1000 m et 2000 m d’altitude avec une perte de 35 cm mars/avril.

    Concernant la haute altitude, là où se situent les glaciers, la couche de neige a diminué de 15 cm en moyenne, une régression moins forte due aux températures qui y restent plus négatives au cours de l’hiver. On note toutefois une perte de plus de 40 cm en avril/mai. La durée de neige au sol y a diminué de 5 jours depuis 1970. C’est bien moins important que la moyenne globale d’1 mois, mais les effets n’en sont pas moins conséquents, la haute montagne étant un milieu extrêmement fragile.

    Du côté des Pyrénées, une étude menée par l’Observatoire pyrénéen du changement climatique montre une baisse de la hauteur moyenne de neige et de la durée d’enneigement entre 1958 et 2017, malgré des tendances réparties différemment sur l’ensemble du massif. En effet, le manteau neigeux a diminué en moyenne de 20 cm à 2100 m d’altitude, passant de plus d’1 m de neige à environ 80 cm. A 1500 m d’altitude par contre, la hauteur moyenne de neige n’a pas beaucoup bougé, avec une couche moyenne de 18 cm sur les 60 ans étudiés.

    On le rappelle, début février, l’enneigement a été le plus bas jamais mesuré depuis 24 ans où la surface et l’épaisseur du manteau neigeux étaient au plus bas. Les importantes chutes de neige qui ont suivi début mars ont permis de revenir dans des moyennes de saison, toutefois, et nous le verrons plus bas, cela ne permet pas de freiner la fonte des glaciers car ces fluctuations d’enneigement ne permettent pas de former de la glace de manière pérenne.

     

    Selon les scénarios du GIEC, basés sur plusieurs seuils de réchauffement planétaire, on prévoit pour 2050 dans les montagnes françaises une couverture neigeuse réduite de 10 à 40 %. Cette diminution passera de 30 à 80 % d’ici 2100. Tout comme pour préserver les glaciers, il est fondamental de respecter le seuil des 1,5° de réchauffement fixé par les Accords de Paris si on veut conserver un enneigement décent en montagne.

    Les impacts de l’affaiblissement de l’enneigement sur les glaciers

    Station de Porté-Puymorens (66) début février 2024. Par Nicolas Vaillant.

    Glacier sombre, sans couche de neige. Par Arthur Vaillant.

    La neige va se transformer d’abord en névé, qui est une forme plus compacte que la neige. On appelle névé typiquement de la neige qui a survécu au moins 1 an à une saison de fonte. Il se compacte ensuite de plus en plus pour former de la glace. La durée de formation de cette glace dépend des latitudes sous lesquelles se trouvent les glaciers. En Alaska par exemple, la glace se forme à une profondeur de névé d’une dizaine de mètres et va mettre environ 5 ans.

    Romain Millan, glaciologue

    Le manque d’enneigement pendant l’hiver est donc extrêmement critique pour cette période d’accumulation. Le glaciologue pyrénéen Pierre René nous apprend que “pour les glaciers des régions tempérées, il y a deux saisons contrastées : une où le glacier grossit parce qu’il neige, la saison hivernale, et une saison d’été où la neige et la glace fondent. En théorie, pour les glaciers, la saison d’hiver dure 8 mois. Sur cette période, on considère que les glaciers ne fondent pas.

    Afin d’évaluer si un glacier est en équilibre, a accumulé de la neige ou est déficitaire, il faut regarder la surface recouverte de neige à la fin de l’été et voir quelle part du glacier encore en neige n’aura pas fondu, et inversement. Pour qu’un glacier soit en équilibre, 60% de sa surface doit être encore enneigée.

    Donc 60% de la surface totale du glacier doit encore être recouverte par de la neige de l’hiver à la fin de l’été, et si c’est le cas il est équilibré. Et pourquoi c’est 60% – 40% pas 50 – 50, parce que la surface de neige qu’il reste sur le glacier compense tout ce qui a fondu au niveau de la glace à nu, de la zone d’ablation. Et comme la neige a une densité plus faible que la glace, il faut un peu plus de neige en surface que de glace pour compenser. Dans les Pyrénées, en 2023, la moyenne est de 2%, on est donc très moin des 60% qu’il faut pour que les glaciers se maintiennent.

    Pierre René, glaciologue

    Ces explications sont également valables pour les Alpes, comme nous l’explique la glaciologue Delphine Six. Toutefois, elle fait une distinction importante entre la très haute et la moyenne altitude, qu’on ne retrouve pas dans les Pyrénées où les altitudes sont moins élevées (en dessous de 3 500 m contre de nombreux sommets à plus de 4000 m dans les Alpes).

    Il faut vraiment distinguer deux choses. En très haute altitude, au-delà de 3000 m, il n’y a aucune tendance statistique. Cette année par exemple, on a pris un record d’accumulation depuis quelque temps. Par contre ce qu’on observe, c’est un déséquilibre dans les zones basses des glaciers, effectivement parce qu’en hiver on a de moins en moins de neige. Les grands glaciers comme la Mer de glace ou le glacier d’Argentière qui descendent jusqu’à 2000 m subissent des épisodes de pluie en hiver qui font fondre le manteau neigeux. Et quand le printemps arrive, on n’a pas de neige pour protéger le glacier, donc il se retrouve très vite en glace dans les parties basses. Donc forcément quand il est en glace, il est plus sombre, il capte plus le rayonnement et il fond plus vite…

    Delphine Six, glaciologue

    Il s’agit du principe de l’albédo que nous explique Romain Millan : “Plus une surface est sombre et plus elle va absorber du rayonnement, et donc fondre dans le cas d’un glacier. C’est pour cela aussi que les océans, très sombres, se réchauffent très vite.”

     

    Les glaciers dépendent donc directement de la neige, un lien qui se retrouve bouleversé par les effets du changement climatique car comme l’a tristement dit Camille Etienne en parlant des neiges éternelles, les névés : “ces étendues blanches n’ont d’éternelles plus que le nom.” C’est l’une des raisons pour lesquelles Camille a voulu lancer La Voix des Glaciers, pour faire entendre cette voix et vous permettre de vous en saisir. Avoir accès à ces informations est essentiel pour comprendre et prendre conscience de la situation des glaciers. Le savoir est la première étape de l’engagement, et on peut encore faire en sorte que certaines de ces neiges restent éternelles. La fenêtre d’action est courte, mais nous pouvons encore la saisir !


    1. Empilement de couches de neige sur le sol correspondant à des chutes de neige successives. La couverture neigeuse ou manteau neigeux recouvre les massifs de montagne au cours de l’hiver qui se retrouvent blancs pendant plusieurs mois consécutifs.

    Les glaciers des Pyrénées : des lanceurs d alerte sur le changement climatique

    Les glaciers des Pyrénées : des lanceurs d alerte sur le changement climatique

    Dans les Pyrénées, au début du mois de février, on a enregistré le pire enneigement depuis 24 ans avec seulement 8% de couverture neigeuse sur l’intégralité du massif alors qu’elle en recouvrait 40% un mois plus tôt.

    Ces chiffres sont dramatiques dans les Pyrénées où la totalité des glaciers sont définitivement condamnés à disparaître d’ici 2050 et dont la fonte s’accélère dangereusement d’année en année. Jusqu’alors jamais touchés par les activités humaines, ils se retrouvent parmi les premiers condamnés par ces dernières.

    Le manque d’enneigement pendant l’hiver est extrêmement critique pour l’accumulation de glace. Le glaciologue Pierre René de l’association Moraine, l’observatoire des glaciers pyrénéens, nous apprend que “pour les glaciers des régions tempérées, il y a deux saisons contrastées : une où le glacier grossit parce qu’il neige, la saison hivernale, et une saison d’été où la neige et la glace fondent. En théorie, pour les glaciers, la saison d’hiver dure 8 mois. Sur cette période, on considère que les glaciers ne fondent pas. Avec le manque de neige en ce début d’année 2024, on peut déjà craindre un déficit glaciaire même si, comme le rappelle Pierre René, tout espoir n’est pas perdu car il reste encore trois mois d’hiver.

    La température moyenne dans les Pyrénées a déjà augmenté de plus de 2 degrés à cause des émissions de gaz à effet de serre, une hausse qui leur a été fatale. Depuis 1850, ils ont perdu 90% de leur superficie. Le climat régional et l’altitude (le pic de l’Aneto s’élève à 3 400m) expliquent la fragilité de ces glaciers, souvent mis de côté alors qu’ils sont tout aussi précieux pour la préservation des écosystèmes et pour comprendre les évolutions du climat.

    L’année 2022 a tiré une sonnette d’alarme avec un record de fonte, un record de diminution de surface, de longueur et d’épaisseur depuis que je mesure en 2002. Et derrière en 2023, le record est battu. Donc on a deux records qui s’enchaînent, on va voir ce que ça donne dans les années à venir mais ça fait l’effet d’une accélération.

    Pierre René, glaciologue

    La suite de cet article reprend les principaux résultats des mesures effectuées en 2023 par Pierre René et recensées dans un rapport dans le cadre de son association Moraine. Elle assure en effet un suivi des glaciers pyrénéens français depuis 2002. Aujourd’hui, 9 d’entre eux sont encore suivis annuellement. Trois indicateurs permettent de connaître l’évolution des glaciers : leur longueur, leur surface, et leur épaisseur.

    Concernant la longueur, les dernières mesures montrent que pendant l’été 2023, la régression a été plus importante que la moyenne de -8,70 m par an, avec une perte de 11,60 m.

    Entre 2002 et 2023, la surface des 9 glaciers étudiés a diminué de 60% en passant de 140 ha à 56 ha. Cette même surface était d’environ 450 ha en 1850.

    Les dernières données sur l’épaisseur des glaciers pyrénéens sont dramatiques. Un glacier dont 60% de la surface a accumulé de la glace, grâce à la neige qui le recouvre, est en équilibre. Or, “en 2023, on était à 0% quasiment, la moyenne est de 2%, on est donc très loin des 60% qu’il faut pour que les glaciers se maintiennent.” L’accumulation a été quasiment nulle en 2023, et pour rappel, l’enneigement hivernal contribue grandement à cela.

    A titre d’exemple, l’emblématique glacier d’Ossoue situé sur le Vignemale a connu un record de perte d’épaisseur avec -4,51 m d’eau soit 5,01 m de glace, drastiquement plus forte que la moyenne annuelle de -1,80 m d’eau.

    “Quasiment tous les ans le glacier d’Ossoue est à nu à la fin de l’été, sans neige. Le fait que ça se répète aussi souvent, signifie que le glacier n’est pas en équilibre avec les conditions climatiques actuelles. C’est-à-dire que si on stabilise tout d’un coup, que le climat se stabilise, le glacier ne se recharge pas puisque c’est ce qu’il se passe en permanence. Donc même si on stoppait le réchauffement climatique, il continuerait de fondre car il ne s’équilibre pas.

    Pierre René, glaciologue

    Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les glaciers pyrénéens ne peuvent plus s’adapter aux conditions climatiques, devenues trop extrêmes pour leur survie. L’escalade des émissions de gaz à effet de serre et donc des températures depuis le début du XXe siècle est malheureusement trop importante. D’ici trop peu de décennies, il n’en restera plus que des souvenirs. Comme le rappelle très justement Pierre René, les glaciers des Pyrénées doivent désormais servir de “lanceurs d’alerte sur le changement climatique. Ils doivent devenir des symboles de ce changement, et nous devons être là pour porter leur voix afin que même s’ils disparaissent des sommets, ils continuent de vivre dans les esprits, les récits, les images, et être porteurs d’engagement.

    Mathieu Crépel, du film Vinhamala (sélection de la saison 2 de La Voix des Glaciers), champion du monde de snowboard originaire des Pyrénées, parle d’ailleurs beaucoup de l’importance de créer et entretenir une mémoire des glaciers des Pyrénées. C’est une voie que suit La Voix des Glaciers, aspirant à rassembler autour de cet enjeu et à élever cette voix glaciaire.

    “J’invite de plus en plus les gens à honorer les glaciers des Pyrénées en allant leur rendre visite parce qu’on est en train de perdre des éléments du patrimoine naturel. Ils sont agonisants, en fin de vie, mais j’invite vraiment les gens à avoir cette curiosité de la montagne. On est face à une transformation irréversible de la haute montagne, les glaciers sont des symboles de cette haute montagne. Les paysages changent vite, il y a un patrimoine naturel, et culturel aussi parce qu’il y a beaucoup d’écrits, de témoignages culturels concernant l’existence et l’ampleur de ces glaciers. On voit que c’est une vraie source d’inspiration artistique, et on les personnifie souvent, on en parle comme des êtres vivants, ce qui leur donne, au-delà du naturel, une vraie dimension culturelle.”

    Pierre René, glaciologue

    Les glaciers font partie d’un patrimoine naturel et culturel précieux. Les effets de la fonte qu’ils subissent sont multiples. Entre biodiversité, ressources en eau, paysages, pratiques de la montagne, activités économiques… Ils sont nombreux et déjà là, s’accélèrent, et nous devons nous y adapter urgemment avant d’en être contraint… mais nous en parlerons dans un prochain article !

    Si vous voulez suivre des informations sur les glaciers des Pyrénées et soutenir l’association Moraine : site de l’association Moraine

    Des bénévoles de POW sont allés sur le glacier d’Ossoue avec Pierre René en septembre 2023, vous pouvez retrouver leur retour d’expérience ici : article sur la sortie au glacier d’Ossoue.