Retour sur le One Planet Polar Summit

Retour sur le One Planet Polar Summit

Il y a quelques semaines, Garance et Laura de la Team POW se sont rendues au One Planet Polar Summit, le tout premier sommet international consacré aux glaciers et aux pôles. Un sommet international pour les pôles et les glaciers, mais pour quoi faire ? Est-ce que ça a été utile ? On vous dit tout !

Si vous nous suivez vous le savez, les glaciers et les pôles jouent un rôle indispensable dans la régulation du climat, du cycle de l’eau, la montée du niveau des mers, l’effet d’albédo, l’accès à l’eau, etc.
Ils sont les moteurs du changement climatique ! Les enjeux liés à la cryosphère sont environnementaux mais aussi sociaux, commerciaux, et géopolitiques. Et surtout ces enjeux sont globaux, ce qui signifie que le monde entier est concerné d’une façon ou d’une autre car ce qui se passe aux pôles ne reste pas aux pôles. 

Aujourd’hui, les régions polaires et les glaciers vont très mal et les récents constats scientifiques font tous peur : l’Arctique sera privé de banquise d’été dès 2030, l’Antarctique n’a jamais eu une couverture de glace aussi faible, l’Arctique se réchauffe 4 fois plus vite que le reste de la planète (le Svalbard 6 à 8 fois plus vite, nos glaciers français c’est 2x plus vite) et le Groenland est responsable – à lui seul – de 17% d’élévation du niveau des mers. Même si les pôles nous semblent être des régions lointaines, notre quotidien est directement lié à eux.  Alors il était grand temps qu’un maximum de pays se réunissent pour traiter de ce que le GIEC considère comme l’une des 10 menaces majeures du réchauffement climatique : la fonte des glaces. Et si la cryosphère est en voie de disparition aujourd’hui, c’est à cause des trop fortes émissions de GES et de la combustion d’énergies fossiles pour les activités humaines.

C’est dans ce cadre que le Président de la République, Emmanuel Macron, et l’Ambassadeur des pôles et des enjeux maritimes, Olivier Poivre d’Arvor, ont initié le One Planet Polar Summit. Ce sommet s’est déroulé le 8, 9 et 10 novembre au Museum national d’Histoire naturelle de Paris et il a rassemblé chercheurs, scientifiques, ONG, explorateurs, fondations et représentants des peuples autochtones pour faire part des constats et observations scientifiques aux leaders politiques. Parmi tout ce monde il y avait des noms connus comme : Jim Skea, Valérie Masson Delmotte, Christophe Béchu, l’Institut Paul-Emile Victor ou encore Jean Jouzel. Du côté des scientifiques, une des attentes principales de ce sommet était de voir la Stratégie Polaire d’avril 2022 obtenir un financement. Parallèlement, l’enjeu pour les ONGs était de mobiliser tous les acteurs pour motiver les pouvoirs publics à passer à l’action et obtenir des engagements fermes de la part des leaders politiques. En parallèle de ce sommet se tenait le Forum de Paris sur la Paix. Lors du sommet, les différentes personnalités politiques ont insisté sur le fait que l’équilibre de la paix dans le monde dépend largement de la gestion de l’Arctique et de l’Antarctique. Ce One Planet – Polar Summit s’inscrit dans la continuité du One Forest Summit du 1er et 2 mars 2023 qui été dédié aux forêts tropicales.

Pour marquer l’ouverture de ce sommet, POW était présent aux côtés d’autres ONGs (comme nos voisins de Mountain Wilderness) et glaciologues pour demander la mise en place de 4 mesures fortes et immédiates pour protéger les glaciers, incluant notamment un arrêt définitif des aménagements sur glaciers en vue d’activités touristiques (coucou le glacier de la Girose).
 Vous pouvez lire et signer cet appel ici !


Les deux premières journées étaient consacrées à un forum scientifique qui a regroupé l’ensemble de la communauté scientifique internationale avec notamment les experts du GIEC et de l’IPBES. Séparés dans des salles différentes, ces trois groupes de travail avaient pour objectif de préparer les recommandations politiques. Les scientifiques sont venus présenter leurs travaux à tour de rôle. Le mercredi 8 au soir, s’est tenu le lancement de la Fondation Albédo pour la Cryosphère. Cette fondation était annoncée dans la Stratégie Polaire pour 2030 intitulée “Équilibrer les extrêmes” et elle a été créée sous l’égide du CNRS par Frederik Paulsen, milliardaire et explorateur suédois qui souhaite soutenir la recherche polaire française.
La deuxième journée a permis de poursuivre le travail de la première, mais c’était également l’occasion de parler des écosystèmes post-glaciaires. En effet, protéger les glaciers est essentiel mais il faut déjà anticiper la protection des espaces et écosystèmes post-glaciaires. Une étude parue à la fin de l’année 2022 a démontré que d’ici la fin du siècle on aura perdu la moitié des glaciers sur Terre, ce qui signifie que de nouveaux écosystèmes vont apparaître suite à la fonte des glaciers et qu’il faut d’ores-et-déjà s’attaquer à la protection de cette future nature. Et c’est notamment le message qu’entend porter le maire de Bourg Saint Maurice, Guillaume Desrues, avec la mise en place d’un projet pédagogique autour de l’Aiguille Rouge. Au cours de sa prise de parole, le maire de BSM a insisté sur le fait que le ski est une activité qui doit faire preuve de résilience et d’adaptation face à la disparition des glaciers. Il a d’ailleurs souligné : Il faut une transition de modèle économique et cet engagement doit notamment passer par le ski.(NDLR: en France, 8 domaines skiables permettent de skier sur un glacier)

 

Conclusions :

Que faut-il retenir de ce premier sommet ? L’aboutissement de ce sommet c’est l’Appel de Paris pour les glaciers et les pôles qui combine les recommandations scientifiques mais aussi celles de la société civile et qui a été signé par 30 pays. Parmi ces pays, on ne retrouve pas les pays arctiques.

À l’occasion de sa déclaration le 9 novembre, Emmanuel Macron a notamment annoncé : 

  • 1M pour la recherche polaire
  • Un nouveau navire à capacité glace pour la flotte océanographique française qui portera le nom de Michel Rocard
  • La rénovation et la modernisation des stations Durmont d’Urville et Concordia en Antarctique en minimisant leurs impacts sur l’environnement 
  • Renforcement du budget de l’IPEV (Institut Paul-Emile Victor)
  • Sa volonté de créer des aires marines protégées pour l’Arctique et l’Antarctique. 

Concernant les glaciers de la métropole, le Président appelle à une concertation pour voir la totalité des glaciers de la métropole en protection forte (actuellement c’est 60% des glaciers qui sont en aire protégée de niveau fort). Une annonce qui a rendu optimiste de nombreuses personnes, comme celles militant pour l’arrêt des travaux sur le glacier de la Girose.
Sauf que comme souvent, derrière les annonces, il faut éviter de se réjouir trop vite, car quand on dit qu’une concertation va avoir lieu, ça veut dire que : 1. ça va prendre du temps 2. pour l’instant ça n’engage à rien. 


En attendant, on tient à rappeler encore et encore que l’efficacité de ces mesures est conditionnée à la réduction de nos émissions de GES (induisant la sortie de notre dépendance des énergies fossiles et l’application de l’accord de Paris.) Ce qui a d’ailleurs été souligné dans les recommandations de la société civile et les recommandations des scientifiques, car augmenter le budget de la recherche, c’est très bien. Mais ne pas augmenter drastiquement toutes actions limitant le réchauffement climatique, ça l’est beaucoup moins et ça rend inutile la 1ère mesure.

 

Rappelons ici que malgré cet appel, aucune mesure ne sera efficace si nous ne réduisons pas de manière drastique nos émissions de gaz à effet de serre et restons en dessous des 1,5°C de réchauffement.

Lydie Lescarmontier

Glaciologue

Le point positif à retenir néanmoins, c’est que la mobilisation -notamment entre ONG et scientifiques – ça marche (parfois, mais c’est la note positive qui fait du bien) et c’est nécessaire afin de faire remonter des sujets à la classe politique. Maintenant, à nous de rester vigilants sur la concrétisation des différentes paroles et surtout, à nous de veiller à ce que des engagements forts soient pris sur d’autres sujets (comme le transport évidemment !).

Les experts mondiaux ont donné une feuille de route pour l’action sur la cryosphère. Nous avons maintenant besoin du courage politique des dirigeants pour la mettre en œuvre

Geneviève Pons

Directrice honoraire de la Commission Européenne

On prend bonne note !

JO 2030 en France : pas à n importe quel prix

JO 2030 en France : pas à n importe quel prix

Des JO d’Hiver 2030 en France : pas à n’importe quel prix pour l’environnement et les territoires de montagne

20 ONGs et plus d’une centaine d’athlètes, élus, professionnels et habitants des territoires de montagne, scientifiques, ou experts de l’environnement et de l’événementiel posent les conditions environnementales pour des Jeux
d’Hiver compatibles avec le respect des limites planétaires et bénéfiques pour les populations et les territoires.

Mardi 7 novembre dernier, la France a officialisé sa candidature pour l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver 2030. Porté par les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur, le dossier de candidature de la France a été déposé au Comité International Olympique (CIO) par le CNOSF. Prochaine étape, une présentation au CIO le 21 novembre, puis l’officialisation de la liste des candidats, qui devront alors détailler leurs projets.
L’attribution des Jeux d’hiver 2030 sera enfin annoncée au cours de l’année 2024. Candidate malheureuse à l’organisation des JO d’Hiver 2018 avec Annecy, la France n’a plus accueilli cet événement depuis Albertville en 1992.
Au regard des enjeux climatiques et environnementaux actuels et futurs, un collectif de 20 ONGs, athlètes, élus, professionnels et habitants des territoires de montagne, scientifiques, ou experts de l’environnement et de l’événementiel ont esquissé les conditions environnementales que les Jeux Olympiques et Paralympiques d’Hiver 2030 doivent respecter pour pouvoir prétendre être compatibles avec le respect des limites planétaires et bénéfiques aux territoires et à leurs populations.
En effet le sport, et plus particulièrement les sports d’hiver et les territoires de montagne, sont et seront de plus en plus impactés par les conséquences du changement climatique et la perte de biodiversité. À la fois responsables et victimes, les activités sportives et les événements sportifs sont constituants et essentiels pour nos sociétés. Cependant, si nous souhaitons profiter des bienfaits de ces activités dans le futur, elles doivent à la fois réduire leurs impacts environnementaux, s’adapter aux conséquences du changement climatique et contribuer à la transition écologique de notre société.
Les grands événements sportifs, voulus et soutenus par les pouvoirs publics, doivent se penser et s’organiser comme des outils au service d’un projet de société et de territoire, permettant l’habitabilité de ces espaces à long-terme. Si les Jeux Olympiques et Paralympiques d’Hiver ont un effet de catalyseur et d’accélérateur de politiques publiques, les investissements financiers et matériels importants qu’ils nécessitent (rénovation d’infrastructures sportives, de réseaux de transports, de logements etc.) sont une opportunité de mettre en œuvre une véritable transition des territoires de montagne. Cette transition doit permettre d’assurer leur habitabilité à moyen et long terme, de faire évoluer l’industrie du tourisme d’hiver, d’anticiper les enjeux sociaux engendrés par le réchauffement climatique et de préserver les écosystèmes. L’événement doit être au service de l’intérêt général.
Les conditions définies par ce collectif posent les bases des mesures à prendre sur le plan
environnemental pour des Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver compatibles avec le respect des limites planétaires, et bénéfiques pour les territoires. Sans le respect de ces
conditions par les organisateurs, ces Jeux d’Hiver 2030 contribueront malheureusement au dérèglement climatique et à la perte de biodiversité, auxquels font déjà face les territoires de montagne aujourd’hui.

Conditions pour une évolution indispensable du cadre et de la gouvernance
1. CIO et Fédérations internationales : intégrer les évolutions du climat dans la conception
de l’événement
2. État et collectivités : conditionner les aides publiques au respect de conditions environnementales notamment à une division par 2 des émissions de gaz à effet de
serre
3. CIO et Fédérations internationales : réduire le transport aérien nécessaire aux athlètes
pour être sélectionnés pour les Jeux
4. État et collectivités : organiser une consultation citoyenne
5. Mettre en place un comité de suivi indépendant afin d’assurer une gouvernance qui
porte les sujets environnementaux
Conditions pour une organisation respectueuse des limites environnementales
Une sobriété nécessaire dans les aménagements et infrastructures
6. Garantir des pistes faites très majoritairement avec de l’enneigement naturel
7. Organiser des Jeux à partir d’infrastructures 100% existantes aujourd’hui
8. Garantir la préservation de 100% des sites naturels
9. Assurer la rénovation thermique des bâtiments énergivores utilisés pour l’événement
10. Une alimentation électrique assurée à 95% par le réseau
Un recours minimal au transport aérien et à la voiture individuelle
11. Réduire au strict minimum les recours au transport aérien tout en permettant aux
publics d’autres régions du monde de vivre l’événement depuis chez eux
12. Utiliser zéro hélicoptère autre que pour la sécurité / les secours
13. Rendre accessible au moins 80% des sites en train ou autres transports en commun
Une gestion éthique et durable des consommables
14. Produire ou consommer zéro objet à usage unique
15. Proscrire les goodies et assurer 100% des achats responsables
16. Garantir 80% d’alimentation durable
17. Renoncer aux partenariats avec des sponsors dont l’activité promeut des conduites et des produits fortement polluants ou consommateurs de ressources

Document “Les Conditions environnementales pour les Jeux Olympiques et Paralympiques d’Hiver 2030” : https://urlz.fr/osb0

CONTACTS :
● Contact du collectif : collectifsportenvironnement@gmail.com
● Maël BESSON, Coordinateur du document, spécialiste indépendant de la transition
écologique du sport : besson24@gmail.com・06 86 90 44 76
● Xavier CAILHOL : Chercheur sur les évolutions de la haute montagne dans un contexte
de changement climatique et aspirant Guide de haute montagne
x.cailhol07@gmail.com・06 16 08 82 93
● Marie Donin-Habert : Championne Olympique Biathlon Mariedorin@hotmail.fr
06 33 20 26 17
● Antoine PIN, Directeur de l’ONG Protect Our Winter France (POW) :
antoine@protectourwinters.fr・07 68 49 88 59

ONG signataires : ACTS FOR THE SUMMIT, ANESTAPS, Big Bang Ballers, EcoloSport, Féclaz Sport & Nature, Game Earth Fund, Les ÉcoAthlètes, Match For Green, Mountain Riders, No Plastic in my Sea, Protect Our Winters France Recyclerie Sportive, Sport and Sustainability International (SandSI), Sport For Future, Surfrider Foundation Europe, Trail Runner Foundation, Un Seul Terrain, Une bouteille à la mer, Uni-Vert Sport, 1% for the Planet France
Liste complète des signataires : https://urlz.fr/os8X
Lien pour signer : https://forms.gle/9tkUEwvNa7Kp2SQR8

Conseils pour voyager en train avec Interrail

Conseils pour voyager en train avec Interrail

Dans le cadre du concours TOPOW (si tu n’es pas au courant, on fait gagner des pass Interrail ou des vélos : toutes les infos ici !) on voulait organiser des lives qui viennent apporter de l’aide aux personnes qui souhaiteraient partir avec Interrail, s’organiser une aventure à vélo, prendre des images mémorables de leur trip…
Aujourd’hui, on fait un focus sur le voyage en train !

Pour l’occasion, on était en compagnie de Mollow, une asso qui a créé une plateforme collaborative pour trouver des itinéraires de voyage. Attention, à peine tu auras cliqué que tu auras déjà envie de partir !

Durant le live, on aborde pas mal de choses différentes et notamment un certain nombre de liens à avoir de côté. Comme on est hyper sympa, on t’offre tout ce qui nous paraît pertinent ci-dessous :

– Le site de MOLLOW
On ne va pas en remettre une couche, mais forcément c’était le 1er lien qu’on voulait mettre dans la liste

Le groupe Facebook Interrail Travelers 
Si tu as une question concernant le ferroviaire dans un pays, le fonctionnement des réservations sur l’appli Interrail ou encore un conseil sur où prendre son billet le plus simplement, ce groupe est pour toi.

Carte Interrail / Carte des trains de nuit / Carte Open Rail
L’un des meilleurs moyens de se projeter en terme d’itinéraires, c’est les cartes !

Liste des sites de réservations par pays
Comme on explique dans le live, réserver sur l’appli Interrail, c’est pas toujours le bon plan quand on veut payer le moins cher possible (et aussi en terme de fiabilité d’horaires). Le mieux c’est de réserver sur le site du pays en question quand c’est possible.
Pour aider, la communauté Interrail a créé un article qui recense tous les sites par pays !

Guide Greenpeace 
Greenpeace a créé un guide avec 41 idées de voyages écologiques en Europe. Toujours + d’idées pour toujours + de voyages sans avion !

Article d’un voyage Interrail par votre serviteur
Histoire de vous donner davantage envie et de vous montrer le genre de trajets possibles avec le pass que l’on fait gagner avec TOPOW !

– Pour terminer, c’est pas un lien mais un conseil qu’on dit dans le live mais qu’on rappelle ici : ne sous-estimez pas l’importance des newsletters. 
Le voyage en train, que ce soit en France ou en Europe, ça peut être très cher, mais ça peut aussi être hyper accessible parfois. Malheureusement, quand on prend des lignes longue distance, c’est souvent 1er arrivé 1er servi pour les prix moins chers. Alors pour être au courant, abonne toi aux newsletters des compagnies qui t’intéressent. Et tu peux même les contacter pour demander quand ouvriront les billetteries sur certaines lignes !

Recap de la Convention POWpulaire : la place des Femmes en Montagne

Recap de la Convention POWpulaire : la place des Femmes en Montagne

La place des Femmes en Montagne, c’est le sujet de départ de notre dernière Convention POWpulaire, ce format de café-débat en ligne que l’on anime tous les 1ers mercredi du mois ! Pour l’occasion, on était en compagnie de membres de l’équipe du festival Femmes en Montagne, qui a lieu du 2 au 5 novembre, et notamment d’Antonia Bouvier, qui vient de terminer un travail de mémoire sur le sujet. Pour vous donner envie de venir aux prochains rendez-vous, ou encore pour vous donner des pistes, des recommandations et autres infos donnant envie de s’intéresser au sujet, on vous propose un petit tour retour sur cette super soirée.

On a commencé par une présentation du festival. On ne vous refais pas cette dernière, mais si vous ne connaissez pas le festival, au moment où ces lignes sont publiées il n’est pas trop tard, rendez-vous sur leur site.

Ensuite, Antonia nous a partagé une présentation de son travail de recherche.
Cette dernière commence par un chiffre fort : 2%. 2%, c’est la part de guides de hautes montagnes qui sont des femmes. Ces 2%, Antonia les met en perspective d’un autre 2% : c’est aussi ce que les glaciers des Alpes françaises perdent en surface chaque année depuis 2005.
C’est par cette mise en perspective et ce clin d’œil entre pourcentages que de grandes questions interviennent tôt dans son mémoire.
Inégalités de genre ? Fonte des glaciers ? Pourrait-il exister un lien entre l’exploitation de la nature et l’oppression des femmes ?
Antonia se sert du sujet de l’alpinisme pour mettre en exergue des problématiques d’inégalités présentes partout en montagne. Il y a 40% d’adhérentes dans les fédérations de montagne, mais 10% de femmes sont leaders des sorties, et 2% sont guidées par des professionnels.

Les raisons expliquant cette disparité sont nombreuses. Parmi elles, la représentation. Dans son mémoire, Antonia cite Cécile Ottogalli – Mazzacavallo, autrice de la thèse « Des femmes à la conquête des sommets : Genre et Alpinisme » qui affirme que : « L’Histoire de l’alpinisme raisonne au nom de ses héros masculins ». En effet, depuis le début du XVIII siècle l’alpinisme représente l’effort intensif et la force surhumaine d’hommes qui partent défier les sommets alpins les plus hauts : « un homme, aventurier, hyper responsable, physiquement irréprochable, jamais soif, jamais peur, jamais froid ».

Cette représentation principalement des exploits des hommes n’a pas tellement été bousculée depuis. En 2019, toutes les unes de l’Équipe, tous sports confondus, sont à 98% des exploits masculins.On estime que seul 0,4% de sponsoring mondial est investi pour les athlètes et équipes féminines

Antonia a ensuite entamé un début de réponse à la question : pourquoi la place des femmes en montagnes est liée aux combats environnementaux. Un constat d’ailleurs applicable plus généralement à l’échelle de la planète. On vous partage un extrait directement de son mémoire qui appuie sur l’un des points fondamentaux du problème :

” Il est indéniable que la société exerce une influence considérable sur la montagne et sur les femmes. La déclaration de la COP 26 selon laquelle le changement climatique “n’est pas neutre du point de vue du genre” renforce cette idée. En effet, il est alarmant de constater que 80 % des personnes déplacées par les catastrophes et les changements climatiques dans le monde sont des femmes et des filles (Les femmes sont les premières victimes de la crise climatique, selon la COP26, 2023). Ce chiffre souligne la vulnérabilité accrue des femmes face aux conséquences environnementales et met en évidence une inégalité structurelle préexistante. “

Les femmes ne partent pas d’un terrain de jeu égal – économiquement, socialement et politiquement. Elles sont plus vulnérables à cause de ces constructions”

DW Gotelind Alber

Cofondatrice de l'organisation non gouvernementale GenderCC-Women for Climate Justice.

Ont ensuite été abordés des axes comme la répartition du travail différente historiquement selon les hommes et les femmes (notamment en montagne), la façon dont les choses peuvent bouger (trop) lentement, ou encore l’usage du mot écoféminisme…

Vous pouvez retrouver la partie présentation d’Antonia enregistrée ici, et sinon pour mieux comprendre le sujet et comprendre tout le travail de recherche d’Antonia, voici une version publique de son mémoire ici. On vous conseille vraiment d’y jeter un oeil ! C’est un travail passionnant et rigoureux sur une problématique importante quasiment pas traitée en France.
On vous partage également une liste de ressources et de contenus à la fin de l’article.

Pour terminer, on vous rappelle que les Conventions POWpulaire ont pour objectif d’offrir à la fois une dimension informative, qui passe alors par une présentation et/ou des invités, mais surtout d’offrir un temps d’échanges et de débats dans un cadre de confiance.
C’est pour cela que les Conventions POWpulaires ne seront jamais enregistrées en entier, car on ne souhaite pas que cela puisse brider la liberté de parole de chacun.e.
On continuera de vous faire les meilleurs recaps possibles, mais le meilleur moyen de ne rien rater et de venir échanger avec nous, c’est de s’inscrire !
La prochaine c’est le mercredi 8 novembre à 18H30 (inscription ici). On sera cette fois avec Mollow pour parler voyages en trains, conseils sur Interrail, concours TOPOW etc. Viens, ça va être cool et peut-être qu’on t’aidera à organiser ta prochaine aventure !

Aventure dans les Pyrénées avec Pyrénéance

Aventure dans les Pyrénées avec Pyrénéance

L’année dernière, des membres de POW France sont partis dans les Pyrénées pour une aventure de 4 jours organisée par Pyrénéance avec Mathieu Crepel. Motivés par l’envie de mettre en avant à la fois les bonnes pratiques et les montagnes pyrénéennes – loin de la lumière des Alpes – on vous parle de Pyrénéance, de l’aventure qu’on a vécu avec eux, et de la suite (spoiler : on vous conseille de lire jusqu’à la fin)


D’abord, Pyrénéance, c’est quoi ?

Pyrénéance est une agence qui organise des aventures depuis 1994 dans les Pyrénées. Mais plutôt que de vous partager une description qui manquera de saveur, qui de mieux que Jean-Baptiste Coffin, le directeur de Pyrénance, pour vous en parler :
« Nous proposons à notre clientèle, composée d’entreprises, de collectivités (classes de neige, classes découvertes), et de particuliers, des séjours et des événements en montagne, dans les Pyrénées l’été comme l’hiver. Natif du Sud-Ouest, élevé à l’entrée de la plus belle vallée du monde, surfeur et snowboarder invétéré, je prends un immense plaisir à faire découvrir nos contrées aux personnes que l’on reçoit lors de nos séjours. »

Une agence de voyage réceptive portée par des locaux, pour mettre en avant uniquement des territoires que connaissent très bien ces derniers, c’est le genre d’approche qui nous plaît chez POW. Surtout que la question de l’impact écologique (et comme ils font les choses bien, du transport évidemment) est importante chez Pyrénéance.

« Nous poussons nos clients à venir nous rendre visite en train, ce qu’ils font régulièrement. Les transports lors « du dernier kilomètre » sont la grande majorité du temps réalisés en covoiturage. Nous travaillons avec des producteurs locaux, ce qui nous semble tout simplement normal. Alors que ce soit lors d’échanges nourris lors de la visite des chers amis Alpins de chez POW, que ce soit lors de réunions sur l’avenir des territoires auprès d’institutionnels et du Ministère du Tourisme, on réfléchit, on cogite, et on revient toujours sur le même sujet : celui du transport.
On a besoin, dans nos vallées Pyrénéennes, comme dans beaucoup d’endroits dans le monde, de repenser nos systèmes de transports. Le transport en commun devrait être plus commode que le transport individuel, il devrait desservir tous les fonds de vallées, tous les villages encore habités, tous les cols et autres spots merveilleux de nos chères montagnes. Et il devrait être gratuit. »

Humain engagé avec la conscience de ses contradictions, Jean-Baptiste Coffin assume ses impacts écologiques, tout en sachant qu’il faut faire mieux, sans pour autant attendre d’atteindre la perfection avant de se mettre en mouvement. Même si vous ne l’entendrez jamais se mettre dans une position de donneur de leçon.

« On fait beaucoup plus partie du problème que de la solution” explique-t-il, lorsqu’il fait la balance entre ses efforts individuels et les engagements de Pyrénéance d’un côté, et l’impact du tourisme ou ses imperfections de l’autre. »
« En attendant, tout en rejetant le greenwashing, et sans se passer de réfléchir un peu, et bien on s’émerveille, on se laisse absorber par le majestueux environnement qui nous entoure. On se réjouit de la chance absolue de vivre au milieu de ces Pyrénées sauvages, uniques, authentiques. On éduque nos clients par l’enchantement, on les pique à la beauté sauvage, on réenchante leurs vies, même si ce n’est que le temps d’un instant. »

Cet émerveillement, c’est ce qu’ont vécu Arthur et Robin, respectivement employé et sportif ambassadeur de votre asso préférée ! Jean-Baptiste vous raconte comme si vous y étiez :

« C’était un jeudi du mois de février et il faisait froid.
Il avait neigé en bonne quantité à basse altitude à la faveur d’un blocage orographique comme on les aime chez nous. Comme pour souhaiter la bienvenue à nos invités Alpins pour les premiers, et Nantais pour les autres, on quitte la ville sous des grosses averses de chips, de pizza de reblochons ou de bérets selon leurs appellations d’origine pour gagner le haut de la vallée d’Ossau et notre home spot d’Artouste. La journée du lendemain ne fut alors qu’un subtil mélange de bleu et de blanc avec pour seule couverture nuageuse celle de nos respectueux mais néanmoins musclés sprays faisant voler la neige depuis nos tails. La journée où tu oublies de manger, tu oublies que tu as soif, tu oublies les problèmes écologiques … Tous les problèmes sont enterrés derrière les cris de joie poussés à l’unisson, à la faveur d’une frénésie partagée par l’amour de la ride et de cette montagne qui nous donne tant.

Emmenés par Mat Crepel et jamais rassasiés lorsque le menu est aussi alléchant, notre boulimie du jour a heureusement été compensée par une petite approche en peaux de phoque dans la vallée voisine (vous savez, la plus belle du monde). Là-haut, un bivouac monté pour l’occasion, et un petit feu de camp pour réchauffer nos petits doigts pointant les millions d’étoiles qui nous ont enveloppées pour cette nuit d’hiver en pleine montagne. Une nouvelle matinée au ciel bleu azur nous permis de présenter à la troupe les joyaux du cirque de Lescun, j’ai nommé les aiguilles d’Ansabère, merveilleuse anomalie paysagère qui permit d’écrire parmi les plus belles histoires du Pyreneisme et de ses héros, acteurs ici de prouesses ascensionnelles.
Cette beauté nous imprègne, nous envoûte encore pendant les descentes et ne nous lâchera pas jusqu’au soir du troisième jour, où à la suite de quelques rondelles de sauciflard partagées devant un petit feu allumé dans une cabane perdue du piémont de la vallée d’Aspe, nous redescendons de notre petit nuage. Le ride, autant éphémère que fun à cette altitude, nous aura fini les jambes, régalé les semelles, et offert ces nouveaux moments uniques de partage et d’émerveillement collectif.
Ces trois jours furent un véritable voyage à travers l’hiver Pyrénéen, aussi éphémère et fragile que passionnant et envoûtant. Même quand tu connais, même quand tu as déjà fait, tu ne peux pas faire autrement que d’aimer. »

Face à l’urgence écologique, et aux nombreux problèmes sociaux et environnementaux qui en découlent, nous avons besoin d’évasion, d’émerveillement, de découverte…
Non pas pour échapper à des enjeux qui parfois (souvent) nous dépassent, mais au contraire, pour recevoir cette piqûre de beauté, cette énergie qui booste notre motivation pour agir une fois l’aventure terminée.

C’est dans cet esprit, à la fois d’évasion et de prise de conscience, mais aussi de mise en valeur des Pyrénées, que POW a souhaité être partenaire du film Jadis !
Jadis, c’est l’histoire de Sébastien (snowboarder) et William (skieur), qui vont traverser les Pyrénées, du Pic du Midi d’Ossau à l’Aneto, en respectant le matériel et les traditions des époques successives. Des premiers pas en haute montagne effectués en 1789 à leurs performances à ski d’aujourd’hui.
Pour reprendre les mots d’un bénévole de POW France (Emmanuel qu’on salue !), présent à l’avant-première il y a quelques jours à Pau : Jadis, c’est un récit original sur la prise de conscience de notre empreinte carbone à laquelle William adhère avec sincérité. Un parallèle entre passé et présent sur la pratique montagnarde avec en ligne de mire cette nécessaire obligation de sobriété. Le tout agrémenté de splendides prises de vue et assorti d’une BO brillante.

En bref, exactement ce dont nous avons besoin !
N’hésitez pas à vous renseigner sur le travail de Pyrénéance pour peut-être vivre (ou offrir) une aventure avec eux. Et on vous tiendra au courant des projections de Jadis qui auront lieu tout au long de la saison.

Pour finir, comme on vous avait dit de bien rester jusqu’à la fin, on a une surprise ! Dans le cadre de notre collaboration avec Pyrénéance, Nidecker, partenaire de l’expédition, offre une planche de snow à un ou une lectrice de cet article. Pour participer au tirage au sort, répondez à quelques questions via ce formulaire (lien ici) 
UPDATE : Concours terminé, merci d’avoir participer !

Retenue collinaire à Clusaz : récap, communiqué et interview

Retenue collinaire à Clusaz : récap, communiqué et interview

Il y a quelques semaines, le maire de la Clusaz a annoncé un moratoire concernant le projet de retenue collinaire sur le plateau de Beauregard.
On voulait vous proposer alors un récap de ce gros projet qui a animé le territoire pendant des années, avec la position des associations qui ont milité contre, mais aussi une interview de David Perillat-Amédée, adjoint au maire de la Clusaz à qui on a voulu poser plusieurs questions.
Pour rappel, vous pouvez retrouver notre position officielle sur le sujet ici 



D’abord, si le sujet ne vous parle pas trop, on se tente de vous résumer ça en quelques lignes : la Clusaz souhaitait construire une 5ème retenue collinaire, c’est-à-dire un trou d’environ 150 000m3 pour capter l’eau, et s’en servir à la fois pour alimenter le village en eau, mais aussi pour la neige artificielle. Une consultation publique a eu lieu et a recueilli une majorité d’avis négatif, mais la commission d’enquête a rendu un avis favorable, avant que le préfet de Haute-Savoie donne son feu vert.
 Des associations s’y sont opposées avec le soutien de nombreux citoyens, par le biais d’une ZAD (occupation des lieux) notamment. Le tribunal administratif de Grenoble, saisi par les associations, a suspendu l’arrêté préfectoral autorisant le lancement des travaux il y a un an, mettant en doute le caractère essentiel de ces-derniers. Début septembre, le maire a annoncé un moratoire sur le projet, c’est-à-dire la suspension du projet, alors que devait commencer des travaux mais que le tribunal n’avait pas rendu son verdict.

Cette nouvelle sonne la fin d’un dossier qui dure depuis des années, et la victoire d’associations et citoyens qui se sont longuement opposés au projet. Du côté des élus, cela signifie qu’il n’y aura pas de 5ème retenue collinaire pour l’instant. Pour entendre et comprendre les différentes parties, on souhaitait vous relayer d’un côté le communiqué de presse de la coalition d’associations et de citoyens, et de l’autre la parole d’un élu revenant sur ce dossier.

Après la position des associations et le court récapitulatif des faits, on vous partage l’échange que l’on a eu avec David Perrilat-Amédée, adjoint au maire de la Clusaz. ⬇️

La première chose qu’on voulait vous demander, c’est revenir sur la décision du moratoire. Comment cette décision s’est construite en interne ?  


On se posait la question de savoir quand est-ce qu’on allait pouvoir commencer, notamment le défrichement, si on avait une réponse du Conseil d’État favorable, est- ce qu’on allait y aller, etc. On s’est vite rendu compte que le timing n’allait pas, et puis c’était encore un peu de tension qui allait arriver si on attaquait le défrichement rapidement. On s’est aussi rendu compte qu’on pouvait pas engager la responsabilité de la commune pour un montant de 10 millions d’euros alors qu’on ne savait même pas quand et comment on pourrait mettre de l’eau dans cette future retenue. À un moment donné, on a dit “il faut être raisonnable”.
On respecte la justice, le dossier est dans la main de la justice sur le fond. Donc autant se consacrer sur d’autres projets parce qu’on a d’autres beaux projets qui vont bientôt sortir. Pour l’instant, le projet a besoin d’être étudié par la justice sur le fond et on va travailler avec eux pour se préparer à le faire un jour peut-être.

En tant qu’association, on voulait revenir avec vous, sur toutes les mobilisations qui ont eu lieu. Le projet a animé de nombreux débats, ça a mobilisé beaucoup de gens, notamment avec de nombreux opposants qui sont venus exprimer leurs désaccords à travers une ZAD, etc. Dans un premier temps, vous, comment avez-vous vécu tout ça ? Et dans un deuxième temps, comment percevez-vous que ce soit cette mobilisation qui ait amené le tribunal administratif à saisir du sujet ?

Tout d’abord, c’est vrai que ça a été douloureux de vivre ces moments- là, parce que je pense qu’il n’y a aucune station qui a subi autant d’attaques et deux ZADS se sont installés quand même sur le secteur. Des enneigeurs qui ont été détériorés, des menaces de mort qui ont été reçues, des mots plus forts que les autres qui ont été donnés et lancés envers les élus et puis aussi envers la station. Donc, je crois que je ne sais pas qui d’autre comme station de ski ou support de station de ski a vécu ça jusqu’au jour. Donc, à la fois un peu de colère parce que ce n’est pas dans nos habitudes, mais un peu de douleur, et aussi beaucoup d’inquiétude sur ces phénomènes- là. Donc oui, pas facile à vivre. Pas facile à vivre parce qu’ on a été le symbole du ski bashing et puis un peu un paratonnerre pendant que d’autres faisaient leurs investissements dans la neige et dans les retenues tranquillement de leur côté et que nous, on a pris un peu pour tout le monde, un peu le symbole. Ce n’est pas facile à vivre pour les élus qui bossent toute la journée et les techniciens surtout.
C’est un projet aujourd’hui de la Clusaz qui est attaqué par des associations, mais ça fait partie du jeu quelque part. Il faut savoir l’accepter avec humilité.

Si je comprends bien, au-delà évidemment des dérives que tout le monde ne peut que condamner comme les menaces de mort, vous, une des choses que vous comprenez le moins, c’est le fait que ça a été la Clusaz et pas forcément d’autres à côté de vous, plus que le fait que des personnes décident de s’installer, etc, pour exprimer un mécontentement ?

Non, le plus dur, c’est quand on voit cette mobilisation, des gens de l’extérieur, parce que dans ces mobilisations on est passé discrètement voir ce qui se passait, et je n’ai pas vu trop de gens que je connaissais. Cette mobilisation extérieure qui s’est faite à la Clusaz, ça a été violent. Tant mieux si nos voisins ont pu faire tous les projets qu’ils souhaitaient faire. Tant mieux pour eux, tant mieux pour la montagne. Maintenant, oui, la Clusaz est aussi une station qui est regardée, écoutée et peut- être enviée pour certains, donc c’est tombé sur nous. C’est peut- être aussi notre modèle économique de La Clusaz qui est un symbole aussi dans les deux sens.

Je reviens là-dessus mais c’est l’axe le plus important pour nous en tant qu’association, que ce soit ce projet ou un autre : que ce soit pour les citoyens ou pour les associations, d’un côté, c’est ultra condamné et criminalisé le fait qu’il y ait des modes d’action contestataires ; et de l’autre, cela permet d’enclencher des processus totalement démocratiques qui ne se seraient peut- être pas enclenchés d’autres façons.
En voyant tout ça et là, avec le recul maintenant que ce “chapitre” est terminé, qu’est-ce que vous pensez de ça et est-ce que vous tirez des enseignements de la façon dont ce projet a été mené ? Est-ce qu’il y a des choses que vous feriez autrement à l’avenir si c’était à refaire ?

Sur le processus démocratique, il a été fait au moment des élections puisque quand nous, on est arrivé, nouveau mandat, le nouveau maire et les nouveaux élus, ce n’est pas quelque chose qui était méconnu des citoyens. On a été élus à plus de 60 %. C’était marqué dans nos programmes. C’était pas méconnu et on l’a su avec l’enquête publique qu’il y a eu, la grande majorité des citoyens du village soutiennent dans ce projet- là (ndlr : la majorité des personnes participantes à l’enquête publique se sont opposées au projet). Après, c’est cette mobilisation extérieure… Sur le projet en lui- même, il y a des contestataires. Très bien, mais c’est aussi ce que représente ce projet- là qui est contesté. Donc là, ça va au- delà du projet en lui- même.
Je pense qu’il y a eu une mobilisation locale très petite parce que c’est cette petite mobilisation locale qui a fait des vagues et un tsunami par la suite.
On a le droit de ne pas être d’accord sur le fait qu’il soit fait à cet emplacement- là. Forcément, comme toute construction, on enlève des arbres et des trucs et on dénature un petit peu, mais dans le projet, il y a des compensations, il y a des choses qui sont faites pour que ça passe puisque d’ailleurs, on a toujours l’agrément de l’environnement. Ce qui est le plus compliqué pour les gens d’ici, c’est au- delà de ce symbole, c’est que cette mobilisation, elle est devenue incontrôlable sur d’autres sujets, sur un mélange avec d’autres sujets sociétaux.
Alors pour revenir à votre question, oui, il y a des leçons à en tirer. Peut-être que sur l’ensemble des projets, il faut en parler aux associations, certes. Mais nous, ce qui nous intéresse, ce sont les projets locaux. On a toujours travaillé avec nos sociopros, on a toujours travaillé avec nos habitants.

Effectivement, vous vous parlez d’un soutien local, d’un sujet bien connu localement, etc. Sans valider ou remettre en cause ce point, si je vous pose la question de l’avenir, c’est parce que, d’abord ça paraît quasi certain que ce genre de mobilisation et l’implication de personnes sur un plus grand spectre arrivera sur d’autres projets à l’avenir. Et ensuite, est-ce que vraiment, selon vous, une implication extérieure est forcément plus délégitimée quand on sait le nombre de personnes qui sont passionnées, amoureux de montagne, quand on sait le nombre de personnes que la montagne ramène tous les ans et quand on sait l’ampleur et l’importance des sujets écologiques ?

C’est un peu philosophique, moi je suis assez pragmatique.

Je ne pense pas que ce soit philosophique, quand on prend le nombre de personnes qui vont à la montagne par an, c’est à peu près un français sur dix. Est-ce que les personnes qui vont plusieurs fois à la montagne par an, est-ce qu’ils n’ont pas du tout de pouvoir citoyen sur un projet qui aura un impact effectivement à échelle locale, mais aussi à plus grande échelle territoriale ou nationale, par exemple quand on pense aux enjeux de l’eau et aux enjeux climatiques ?

Oui, après, il faut remettre un peu les pieds sur terre. Les projets qu’on a, c’est un centre socio- culturel. Les projets qu’on a, c’est des habitations pour nos habitants, c’est des habitations pour les saisonniers.

Je ne prenais pas le cas de certains projets comme ceux-là.

Avant tout, on n’est pas le totem de la montagne la Clusaz, on est un village, avec des besoins pour les habitants, ils ont des besoins de vivre à l’année.
Donc s’il y a d’autres projets qui touchent plus fermement la montagne, plus fortement la montagne, c’est sûr qu’on s’y prendra autrement. C’est la réponse qu’on attend. Forcément, on va s’y prendre autrement. Mais on cristallise beaucoup sur ce projet d’une cinquième retenue sur la la station. Les projets de la commune, ils ne s’arrêtent pas là.
Donc, en fait, oui, les gens de l’extérieur, désolé, mais on ne focalise que sur un projet qui détruit la montagne, alors que nous, on a toujours géré en bon père de famille et qu’on a d’autres dossiers sur lesquels on a travaillé depuis deux ans.
On a un plan de diversification de nos activités de loisirs qu’on a travaillé depuis deux ans et qui va sortir. Les priorités ne sont pas les mêmes aujourd’hui. Les priorités en 2023 ne sont pas les mêmes qu’en 2020, parce qu’on sait très bien que le “tout ski” ce n’est pas là qu’il faut investir. Après, c’est sûr que s’il y a des investissements qui doivent être faits sur le milieu montagnard, peut- être qu’on ira chercher un peu au-delà de notre tissu local pour faire ces projets-là.

Je prenais vraiment l’exemple de la retenue collinaire, qui comme vous l’avez répété, est un symbole et en même temps un enjeu écologique. Ce projet, à l’instar d’autres projets, même plus gros, si je prends l’exemple du Lyon-Turin, vous comprenez que ce sont des projets qui peuvent amener de plus larges mobilisations ?

Un projet comme le Lyon-Turin , effectivement je comprends qu’il peut y avoir une mobilisation nationale, internationale et que c’est un sujet de société. Nous, aujourd’hui, les projets qu’on a sont quand même pas de la même envergure.
On a quand même beaucoup de renoncements depuis qu’on est là : l’installation d’un club MED, le renoncement d’étendre notre domaine skiable, de ne pas mettre la liaison avec le Grand-Bornand…
Donc sur les sujets “extra-villages” on a déjà fait pas mal de renoncements.
Maintenant, a des beaux projets qui vont sortir. Il y a une réunion publique fin du mois pour exprimer tout cela à la population, parce que c’est à eux d’avoir la primeur de nos annonces et d’autres visions. Mais bien sûr que sur des projets d’une manière plus générale, plus montagne, il faudra forcément travailler avec les associations locales et voire territoriales pour avancer sur ces sujets- là, mais on ne pose pas la question maintenant car ce qu’on va faire c’est plutôt de l’ordre du tissu local.
Notre avenir est là. Nous, la Clusaz, on n’a jamais été chercher des séjours long courrier, on ne s’est jamais dit d’une station internationale… Là maintenant, on a 20% de clientèle étrangère et c’est le maximum qu’on a pu avoir ces dernières années. On a quand même une clientèle très franco- française et de plus, une clientèle très locale avec le bassin Annécien. Aujourd’hui, on n’a pas de projets pharaoniques qui vont venir bouleverser ce milieu.