Le chantier archéologique de Jean-Baptiste Ortlieb

Le chantier archéologique de Jean-Baptiste Ortlieb

Pour sa thĂšse en histoire environnementale, JB Ortlieb Ă©tudie une ancienne « marcairie Â» (ferme d’estive) situĂ©e Ă  1100 m d’altitude dans les Vosges, pour voir comment les modes de valorisation des montagnes ont changĂ© au cours du temps – ou comment les humains se sont adaptĂ©s Ă  leur environnement.

J’ai effectuĂ© une fouille archĂ©ologique en montagne pour l’intĂ©grer Ă  mes recherches pour ma thĂšse en histoire environnementale. On Ă©tudie comment les hommes se sont adaptĂ©s Ă  leur environnement pour monter les troupeaux. C’est une des thĂ©matiques qui permet de mettre en perspective notre propre adaptation aux changements climatiques, puisqu’Ă  l’Ă©poque du site de fouille on est dans une pĂ©riode de refroidissement du climat (appelĂ© Petit Âge glaciaire).

La fouille est la premiĂšre rĂ©alisĂ©e sur une “marcairie”, qui est une ferme d’estive ancienne, exploitĂ©e entre la fin du Moyen Âge et le dĂ©but du XVIIIe siĂšcle pour garder les troupeaux et produire du fromage l’Ă©tĂ©. Rien d’extraordinaire a priori, mais dans les Vosges comme dans les autres massifs français, ces pratiques sont celles qui perdurent depuis des siĂšcles / millĂ©naires, dans les zones qui, aujourd’hui accueillent le plus souvent les stations. Comme la pratique rĂ©crĂ©ative des montagnes (ski, randonnĂ©e…) est rĂ©cente, la question est de voir sur quel hĂ©ritage on se trouve, notamment du point de vue de l’environnement.


Un point intĂ©ressant pour les Vosges (qui ne sont pas bien hautes forcĂ©ment), c’est que tous les pĂąturages d’altitude, qui ont permis un dĂ©veloppement trĂšs prĂ©coce du ski, ne sont en fait pas naturelles, mais anthropiques – d’origine humaine -.

Les Ă©tudes palĂ©oenvironnementales des gĂ©omorphologues avec qui je travaille on montrĂ© que ces dĂ©frichements des sommets datent, pour les premiers attestĂ©s, de l’Âge du Bronze (autrement dit les Celtes, vers 2000 av. J.-C., Ă  peine plus rĂ©cent que les pyramides de Gizeh).


ForcĂ©ment, le paysage a Ă©voluĂ© entretemps, mais aujourd’hui ces milieux sont trĂšs protĂ©gĂ©s (Natura 2000, PNR des Ballons des Vosges) pour la faune et la flore particuliĂšre qu’ils accueillent. De plus c’est parmi les meilleurs spots pour rider dans les Vosges, puisqu’on est suffisamment haut pour la bonne neige et qu’on Ă©vite les arbres. C’est pourquoi sans ces dĂ©frichements trĂšs anciens et rĂ©currents et ces milieux protĂ©gĂ©s, pas de ski – en tout cas comme on le connaĂźt – dans les Vosges. Mais la forĂȘt regagne du terrain, avec la dĂ©prise agricole. Du coup, l’enjeu c’est de connaĂźtre l’Ă©volution et le rapport ancien Ă  l’environnement, en regardant comment les populations locales antĂ©rieures au XVIIIe siĂšcle entretenaient et valorisaient ces paysages et ces milieux naturels, dont on hĂ©rite aujourd’hui pour de nouvelles pratiques.

Alors chez POW on se questionne, quelles seront les trace que nous aurons laissĂ©es pour les archĂ©ologues du futur ? …