Mobilité : l affaire des régions ?

Dans notre article de la semaine dernière (ici), nous avons fait le point sur les émissions de GES par région (gaz à effet de serre) et particulièrement sur le rôle du transport sur ces dernières. On a parlé gros chiffres, voitures et surtout nécessité d’œuvrer pour une transition vers une mobilité bas carbone.
Aujourd’hui, deuxième étape d’Objectif -57 : les compétences des régions ! Retour sur l’évolution des régions et les clés qu’elles ont actuellement en main en ce qui concerne le secteur du transport. Sans trop rentrer dans le détail, nous allons voir pourquoi les régions sont des acteurs essentiels pour mettre en place la mobilité de demain ! 

Retour historique

Au fil du temps, les régions ont beaucoup évolué et de nombreuses réformes ont vu le jour, notamment ces dernières années. Depuis 2002, les régions sont autorités organisatrices des services régionaux de transports ferroviaires de voyageurs.  

Retour rapide sur les dernières mesures importantes : 

2014, Loi Maptam

Des collectivités territoriales cheffes de file sont mises en places.
La région devient cheffe de file pour le développement économique, aides aux entreprise, les transports, la biodiversité, la transition énergétique et l’agenda 21.
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2015, Loi NOTRe et découpage des régions

En Janvier 2015, le découpage des régions est acté et les régions passeront de 22 à 13 à partir du 1er Janvier 2016. Six d’entre elles n’ont pas été modifiées tandis que sept nouvelles régions grand format voient le jour. 
Au mois de juillet suivant, la loi NOTRe est adoptée. Elle vient renforcer les compétences des régions en matière de développement économique et redéfinit les compétences générale des collectivités. 
La loi NOTRe créé notamment un nouveau schéma de planification : le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET). 
Surtout, les régions deviennent des autorités organisatrices de transport de plein excercice. A partir de 2017, les régions récupèrent ce qui était entre les mains des départements jusqu’ici : les transports scolaires, les routes … 

2019, Loi LOM

La Loi d’orientation des mobilités, qui a été votée le 24 décembre 2019, réorganise la compétence « mobilité » à partir du 1er juillet 2021. 
Elle comporte 189 articles qui visent à répondre à l’objectif principal d’améliorer les déplacements quotidiens en intégrant la préservation de l’environnement. 
On ne va pas rentrer dans le détail de cette dernière, mais nous attarder dans la suite de l’article sur les conséquences que cela a sur les régions, qui sont au cœur de cette loi et voient leurs rôles devenir encore plus important.

Les Trains Régionaux Express font partie des multiples responsabilités des régions Crédit: Marc Debrincat

Et maintenant ?

Concrètement, où en est-on maintenant avec la loi LOM? Ce qu’il faut retenir, c’est que dans un premier temps, la loi LOM vient renforcer le rôle des régions. Les régions sont actuellement des AOM (Autorités Organisatrices de la Mobilité). 

Elles ont plusieurs compétences :  

– Organiser des services publics de transports réguliers (urbains ou non urbains) 
– Organiser des services publics de transport à la demande 
– Organiser des services publics de transport scolaire 
– Organiser des services de mobilités actives et partagées (service de location de vélos, plateforme de mise en relation pour le Covoiturage) et contribuer à leur développement (subventions, financements). 
– Organiser, contribuer, verser des aides pour des services de mobilités solidaire 

Mais la loi LOM avait surtout pour objectif de couvrir l’intégralité du territoire avec des AOM, pour que des solutions émergent partout pour l’ensemble des citoyens.  Pour cela, les communes, via leur intercommunalité, ont le choix d’être AOM ou pas. Et si elles refusent, toutes leurs compétences reviendront au régions (elles pourront revenir plus tard aux communes si son périmètre a évolué). Ces-dernières avaient jusqu’au 31 mars pour faire leur choix, les effets de la loi LOM seront appliqués dès le 1 er Juillet 2021. 

Le champ d’action des régions peut donc s’accroître selon les décisions des communes. 
De plus, comme l’explique la Fnaut (Fédération Nationale des Associations des Usagers des Transports) le rôle de la région comme cheffe de file est renforcé, pour coordonner les compétences mobilité de l’ensemble des autorités organisatrices sur leur territoire régional.  Un contrat opérationnel de mobilité, liant les AOM et la région, permettra d’assurer la coordination de tous les acteurs à l’échelle de chaque bassin de mobilité, en associant en particulier les gestionnaires d’infrastructures telles les gares, ou les pôles d’échanges multimodaux. Un contrat opérationnel de mobilité, liant les AOM et la région, permettra d’assurer la coordination de tous les acteurs à l’échelle de chaque bassin de mobilité, en associant en particulier les gestionnaires d’infrastructures telles les gares, ou les pôles d’échanges multimodaux.


L’argent, le nerf de la guerre

On l’a vu, les régions ont des compétences et des responsabilités en ce qui concerne la mobilité. Mais ont-elles les moyens d’utiliser leurs compétences, d’actionner les leviers nécessaires à une transition bas carbone ?

Première chose : la mobilité représente la première dépense des régions. En 2019, le transport était le premier poste budgétaire avec 10,7 milliards d’euros, soit 24,9 % de leurs dépenses.
Les dépenses sont réparties en deux catégories : les dépenses d’investissement et les dépenses de fonctionnement.

Comme le montre le tableau ci-dessus, les dépenses ont augmenté ces dernières années, notamment dû aux différentes réformes que l’on a vues plus haut. Compétences et budgets en hausse : cela montre le nombre de clés que l’on cède aux régions concernant la mobilité.
Cependant, cela n’est pas encore suffisant au vu du défi qui est celui de la neutralité carbone. S’il est difficile pour la grande majorité d’entre nous de se représenter ce que représente 10,7 milliards d’euros, ni même les un peu plus de 3 milliards d’euros qui vont dans l’investissement, on a pu constater la semaine dernière que l’offre actuelle en termes de transport ne répond pas aux enjeux climatiques. On peut donc se demander si les sommes sont suffisantes.

Regardons chez le portefeuille de nos voisins pour se donner un aperçu.
On voit dans ce tableau ci-contre : la population, le budget des régions/territoires et les dépenses par habitant que cela représente. On peut y lire que la France est le pays où la dépense publique décentralisée est de loin la plus faible dans la dépense publique. Quand on reprend les chiffres de la semaine dernière des émissions de GES, notamment le fameux 31 % d’émissions dues au transport en France, on peut se demander si les investissements actuels sont suffisants.

“Les nouveaux élus auront à assumer les décisions, ou non-décisions, de leurs prédécesseurs. Ils auront à décider des mesures indispensables pour répondre aux défis du changement climatique, pour engager la nécessaire réduction de la dépendance automobile et de la consommation d’énergies fossiles, pour réduire l’inégalité territoriale et la fracture numérique”

Bruno Gazeau

Président, FNAUT

Ce n’est pas ici que l’on établira le montant nécessaire de l’enveloppe mobilité des régions et autres questions de financements. Peut-être plus tard.
Ce que l’on peut dire par contre, c’est que les gagnant.e.s des prochaines élections régionales auront devant eux un grand défi : agir pour une mobilité bas carbone.

On l’a vu, ces dernières ont des compétences, des moyens financiers et surtout un mandat particulièrement long 2 pour participer grandement à ce défi.
Reste à savoir si celles et ceux qui sortiront victorieux le 27 juin prochain seront à la hauteur des enjeux.

Ressources :

Chiffres clés des régions en 2019 : https://regions-france.org/wp-content/uploads/2019/09/RDF-Chiffres-Cles-2019-bd-190930.pdf

Bulletin de la FNAUT Elections régionales et mobilités :
https://www.fnaut.fr/uploads/2021/01/287.pdf

Article de la Fabrique Ecologique qui passe en détail le sujet des régions et de la mobilité :  https://www.lafabriqueecologique.fr/quelles-bonnes-pratiques-des-regions-en-matiere-de-mobilite/

Le site de l’Observatoire des objectifs régionaux climat-énergie, pour voir où en est votre région : https://www.observatoire-climat-energie.fr/regions/

Enquête sur les mobilités du quotidien dans les régions françaises : https://www.banquedesterritoires.fr/sites/default/files/2019-10/Ipsos-Transdev-RdF_Mobilit%C3%A9s%20en%20r%C3%A9gionSept2019%20-%20Rapport%20chiffr%C3%A9.pdf


  1. (Les agendas 21 locaux sont nés d’une recommandation de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement qui s’est tenue en 1992 à Rio.
    Un agenda 21 local est un projet territorial de développement durable, porté par une collectivité locale, et qui prend la forme d’un programme d’actions (programme d’actions pour le 21 ème siècle).

  2. Le calendrier électoral de 2027 étant chargé par les présidentielles et les législatives, les prochaines régionales auront lieu en mars 2028