Glaciologie sur le glacier d’Ossoue

Emmanuel est membre des POW Locals dans les Pyrénées. Il nous partage aujourd’hui un récit inspiré de sa sortie sur le glacier d’Ossoue, le 1er août dernier.

« Samedi 1er août 2020, 7h du matin au départ du barrage d’Ossoue (65) en direction du Vignemale, ça fait longtemps que j’attendais ce moment.
J’accompagne Pierre René, le seul glaciologue des Pyrénées en charge du suivi de l’évolution du glacier d’Ossoue à ce jour, le plus grand de la chaîne côté français. Il est perché à 3200m d’altitude au pied d’un mini cirque comptant quelques 3000 connus dont la pique longue du Vignemale (3298m). Pour assurer ce suivi officiel Pierre a créé l’association Moraine en 2001.

Après 3h de marche et 1400m de dénivelé je foule le front du glacier.
Les relevés s’engagent selon un quadrillage cartographique précis. L’Ossoue qui forme une grande cuvette est divisé en 7 secteurs distincts des côtés au centre. En début de saison Pierre René enfonce des bâtons articulés dans la neige jusqu’à atteindre la glace. Tous les mois de mai à octobre, il vient faire des relevés pour suivre l’évolution de la fonte en mesurant la réduction d’épaisseur. Sur chaque point de relevé il sonde également l’épaisseur de neige restante jusqu’au glacier. Ces informations lui permettront d’estimer les volumes de fonte qu’il communique régulièrement à divers organismes publics (Parc National des Pyrénées, région Occitanie, Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique, observatoire national Glacioclim, observatoire international WGMS).

Le verdict est sans appel : en seulement un mois le glacier d’Ossoue s’est abaissé de 3m d’épaisseur ! Mi-août il sera de nouveau à nu, exposé aux températures positives et aux rayons solaires, ce jusqu’à l’arrivée des premières neiges, prévues fin septembre dans le meilleur des cas. 45 jours de souffrance..
Certes il ne s’agit que de la neige de l’année qui fond mais précisons que ce n’est que par la lente transformation de celle-ci en glace, un processus qui peut prendre entre 4 et 5 ans, qu’un glacier peut se maintenir voire se régénérer. Pierre m’explique que depuis qu’il mesure la fonte du glacier d’Ossoue dès 2001, il n’a pu constater qu’une année réelle de recharge en 2013. Souvenez-vous, c’était l’hiver du siècle avec ses historiques records de neige pyrénéens. Faudrait-il pour que les glaciers nous survivent avoir des conditions similaires tous les ans ? Très certainement si nous n’infléchissons pas sur notre empreinte carbone…

Les mesures se terminent et je quitte le plus grand glacier des Pyrénées françaises avec un profond sentiment de tristesse. Combien de temps lui reste-t-il encore à vivre ? L’an dernier il avait déjà perdu le volume de 900 000m3 d’eau… Au delà de leur rôle essentiel sur l’équilibre hydrique et le climat de notre territoire, les glaciers sont aussi les symboles éternels de nos hivers, faisant un trait d’union d’une saison à l’autre. Vouloir protéger nos hivers en agissant à son échelle sur son bilan carbone c’est donner un peu de souffle à ces splendides étendues blanches qui ne sont pas éternelles.
Protect Our Winters sert aussi à transmettre cela. »

Adhérer à Moraine permet à Pierre René de soutenir financièrement ses relevés et vous ouvre la voie à la connaissance des glaciers au travers des diverses sorties de terrain qu’il organise entre juin et septembre. Il est également l’auteur d’un splendide livre sur l’histoire de glaciers pyrénéens.

Pour plus d’infos à propos l’ Association Moraine :
Village de Cathervielle (31110)
asso.moraine@wanadoo.fr
http://asso.moraine.free.fr/